Souk Oufella, sur la route de Chemini, est un village haut perché sur les hauteurs de la vallée de la Soummam. Ce petit bourg semble avoir préservé quelque peu ses traditions ancestrales et est resté aussi à l'abri de l'extension urbanistique qui a pu atteindre les régions rurales. Des oliviers, des figuiers et des cactus font partie du décor de ce village, un héritage ancestral qui est malheureusement souvent en proie aux incendies dévastateurs. De vieux paysans de la région nous ont raconté qu'autrefois une fête était organisée au lancement de chaque saison oléicole. Ce rendez-vous, impatiemment attendu par tout un chacun, a lieu à partir du mois d'octobre. « Le coup d'envoi de la saison oléicole est marqué par le sacrifice de deux ou trois bœufs, voire plus, dans chaque tribu. Cette coutume communément appelée louziâa, très ancrée chez les Kabyles, est une action par laquelle est accueillie une saison que Dieu bénira », explique ammi Salah, un vieil habitant de Souk Oufella, qui fait remarquer qu'actuellement l'amorce de la saison oléicole se fait souvent sans cette cérémonie inaugurale. Jadis, se rappelle-t-il, l'approche de la saison de la cueillette d'olives était vécue comme une fête pompeuse au même titre que les fêtes religieuses ou Yennayer. Mais, regrette-t-il, les temps ont changé. « Ce n'était pas qu'une fête pour la cueillette d'olives mais surtout une occasion de retrouvailles et un rendez-vous de fraternité et de solidarité », ajoute-t-il. Sur la route menant à une oliveraie, notre accompagnateur s'arrête un moment devant les ruines d'une huilerie traditionnelle et fait constater que les huileries traditionnelles disparaissent l'une après l'autre pour laisser place aux huileries modernes. Du haut des ses quatre vingt-dix ans, ammi Salah regrette que « nos traditions ancestrales, pans de notre identité, soient ainsi appelées à disparaître un jour ». Comme lui, beaucoup reconnaissent aux huileries traditionnelles, dont au moins trois sont opérationnelles à l'est de Béjaïa (Boukhelifa et Souk El Tenine), la production d'une huile de qualité. Ceci dit, la cueillette des olives est entamée en Kabylie. Dans les oliveraies, hommes, femmes et parfois, enfants se mettent au travail dès 8 h. A chacun sa tâche. Les hommes sont perchés au sommet des oliviers et les femmes, aidées par les enfants, quand ils sont en vacances scolaires, se mettent à glaner les olives sur le sol. Pour les uns et les autres, se vêtir d'un bon manteau pour se protéger du froid glacial et s'armer d'une bonne patience sont deux choses nécessaires.