Effleuré mercredi dernier, le seuil psychologique des 100 dollars pour le baril de pétrole a été dépassé le lendemain, plongeant dans une forte préoccupation les décideurs européens, qui voient leurs prévisions financières sérieusement compromises et le taux de croissance de leur économie menacé de stagnation, voire de récession. Hier, le commissaire européen aux Affaires économiques Joaquin Almunia a été catégorique : « Le prix du pétrole augmente de manière drastique. Si cela se poursuit, il y aura un impact négatif sur la croissance. » L'Italie n'échappe pas à cette prévision négative, surtout que sa facture d'importation de pétrole dépasse annuellement 26,3 milliards d'euros, ce qui conditionne fortement le budget de l'Etat. Les Européens, malgré les progrès réalisés durant les dernières décennies dans l'utilisation des énergies renouvelables et propres, ne se sont pas encore affranchis de la grande consommation de ressources pétrolières, soit 14 millions de barils par jour, dont ils se servent surtout pour la production de l'énergie et pour le transport des personnes et des marchandises. Pour leur part, les citoyens de ces pays se sentent directement pénalisés par une ultérieure augmentation des tarifs de l'énergie (électricité et gaz), déjà annoncée par les sociétés de distribution italiennes, mais ils accusent aussi concrètement l'effet de cette hausse du prix du pétrole, en faisant le plein de carburant de leur automobile. En Italie, le litre d'essence et celui de diesel coûtent désormais exactement la même chose. Le groupe pétrolier Agip a annoncé hier que le litre d'essence atteindra 1,396 euro à la pompe. Le président de l'Union pétrolière Pasquale De Vita, pour sa part, se veut rassurant : « Il faut espérer qu'il ne s'agit là que d'un pic du prix du baril qui ne durera pas. Mais il faut rester attentif à ce qui se passera dans les prochains jours. » Les associations pour la défense des droits des consommateurs prévoient une marge de dépenses supplémentaires pour les familles italiennes égale à 480 euros par an. Il faut dire que les foyers italiens subissent déjà de plein fouet la cherté de la vie, dont la hausse des frais consentis pour le chauffage des ménages, surtout que cette année un froid glacial s'est abattu sur la péninsule. A Rome, la température est descendue en dessous de zéro degré Celsius ces derniers jours, provoquant la mort de trois sans-abri, alors que les Milanais ont vu les places de leur ville couvertes de neige. La flambée du prix du baril influera également sur les produits alimentaires qui connaîtront une hausse sensible – avertissent les associations pour la défense des consommateurs – conséquence de l'augmentation des coûts de transport pour les sociétés qui les produisent. Les agriculteurs italiens ont fait savoir à leur tutelle que sauf une intervention de l'Etat, par l'octroi d'aides et de subventions, une grave crise menace leurs récoltes. En 2006, ce secteur a dépensé 310 millions d'euros de plus qu'en 2005, à cause principalement de la hausse du prix du carburant. Les responsables de l'Union européenne invitent à la pondération et conseillent d'attendre « les prévisions intermédiaires » sur l'évolution du PIB des pays membres et l'inflation qui seront dévoilées au mois de février prochain.