La capitale est sous haute surveillance. Ses artères connaissent un déploiement massif et inhabituel des forces de l'ordre jalonnant les grands points d'accès au centre-ville. Des barrages supplémentaires ont été implantés dans différentes avenues, notamment aux alentours des institutions officielles, ainsi que dans les grandes agglomérations et sur les axes autoroutiers donnant accès à la capitale. De nombreux agents de police marquent en nombre élevé les venelles algéroises, donnant la fausse impression qu'un cortège officiel de haute importance sera de passage. Cette présence policière est encore plus remarquée devant les établissements de l'enseignement secondaire. Des fourgons et camions de police, avec ce qu'ils peuvent contenir comme éléments des forces de l'ordre, font le guet devant les lycées. Les passants sont tentés de s'interroger sur l'objectif d'un tel renforcement de la présence policière aux abords de ces lieux qui ne constituent pas forcément des cibles habituelles pour les attentats terroristes et encore moins des fabriques de terroristes. Ceci nous amène à dire que nul ne peut dissocier ce déploiement massif des forces de l'ordre de l'événement majeur que représente la grève des enseignants ainsi que celle des lycéens. Les enseignants ont, pour rappel, observé un arrêt de leur activité pendant deux jours, samedi et dimanche, alors qu'un autre syndicat promet d'en faire autant aujourd'hui. Hier, le tour a été donné aux lycéens eux-mêmes d'exprimer leur ras-le-bol de la surcharge des programmes notamment pour les élèves des classes de terminale qui se plaignent de ne pas trouver le temps de préparer l'examen du bac. La crainte de voir un mouvement de protestation au sein des écoles se transformer en manifestation publique semble motiver une surveillance accrue mais exagérée des lycées. Le souvenir d'octobre 1988 est toujours vivace et le rôle joué par les jeunes lycéens de l'époque en portant la colère populaire a laissé des traces dans la mémoire collective. Contactée par nos soins, une source sécuritaire qui a tenu à garder l'anonymat s'est portée en faux sur l'existence d'un lien entre ce déploiement policier et le mouvement de grève dans les lycées paralysant quatre jours durant les établissements du secondaire. « Il n'y a rien d'exceptionnel à ce dispositif, cela entre dans notre travail habituel de préservation de l'ordre. Je tiens à vous dire que cela n'a pas de lien direct avec la grève des lycées », explique notre interlocuteur en précisant que s'il y a un dispositif sécuritaire renforcé c'est une expression « de notre stratégie de lutte contre la criminalité dont le terrorisme ». Interrogé sur le nombre de barrages supplémentaires implantés un peu partout dans Alger, notre interlocuteur souligne qu'il s'agit de barrages itinérants dont le nombre et l'emplacement sont gardés à la propre connaissance des services de sécurité. A noter que la hausse très remarquée du nombre de policiers dans la capitale va aussi en droite ligne de la dernière annonce faite par le ministre de l'Intérieur d'augmenter les effectifs de la police ainsi que ceux de la Gendarmerie nationale comme mesure de renforcement de la lutte contre le terrorisme. Zerhouni avait aussi mis en exergue la décision de renforcer le dispositif de surveillance des villes par des caméras. S'il est salutaire de savoir que le dispositif de lutte contre le terrorisme est consolidé, il est toutefois utile de rappeler que le caractère sacré du respect des libertés publiques et individuelles doit rester au-dessus de toute considération.