Cet éditeur se signale par quatre ouvrages qui mêlent savoir, découverte et plaisir. La réalisation de beaux livres est d'un coût trop élevé pour la majorité des éditeurs, sans compter que leur prix en librairie réduit considérablement les lecteurs. C'est pourquoi de nombreuses maisons n'ont pu en éditer qu'avec les soutiens mis en place avec Alger, capitale de la culture arabe. Parmi elles, les éditions Dalimen qui ont réussi, fin 2007, une incursion dans ce domaine marqué par la diversité et un effort méritoire de qualité. D'abord cet ouvrage consacré à l'histoire d'Alger et que l'on doit à Abderrahmane Khelifa, archéologue de formation et ancien responsable du patrimoine au ministère de la Culture. Les 400 pages de Histoire d'El Djazaïr, Bani Mazghanna se divisent en deux parties. Celle sur l'histoire permet de découvrir qu'Alger renfermait des sites préhistoriques comme le dolmen de Beni Messous (auj. au musée du Bardo), le site de la grotte du Grand Rocher à Aïn Benian où les objets trouvés en contrebas du pont d'Hydra. Elle s'achève sur la conquête coloniale, réduite à un chapitre jusqu'à l'indépendance, tandis que la période ottomane occupe près des deux tiers de cette partie, ce qui paraît démesuré en volume. La deuxième partie porte sur la ville elle-même et consiste en une présentation de ses sites et monuments par genres. Monographique, elle prend l'allure parfois d'un inventaire. Un choix descriptif qui offre en revanche une foule de détails. Dans le chapitre intitulé « Alger colonial », l'auteur s'est centré sur les principaux monuments néo-mauresques négligeant le fait que la ville fut un des laboratoires de l'architecture moderne mondiale. La présentation de l'ouvrage, son grand format et le choix de consacrer près de sa moitié à l'iconographie en rendent la lecture agréable pour une découverte intéressante de la cité. Place à l'art avec Nedjaï à Nedjaï, une odyssée, ouvrage de 240 pages, consacré à l'artiste et coordonné par Abderrahmane Djelfaoui. Dans sa préface, le critique Ali El Hadj Tahar, situe les étapes créatives du peintre et permet de situer les grandes lignes de son évolution. Mohamed Djehiche, historien d'art, souligne l'originalité et la singularité de son travail dans le paysage artistique algérien. Ces contributions introduisent les œuvres de Nedjaï, assez nombreuses, pour constituer une sorte de rétrospective bien qu'il aurait été souhaitable de disposer de plus de grandes illustrations pour le plaisir de la lecture et une vision plus détaillée du travail. Mais ce qui fait tout l'intérêt de cette partie, ce sont les propres textes de l'artiste qui est l'un des rares — on pense à feu Khadda notamment — à manier à la fois le pinceau et la plume. Non seulement ses notes et pensées délivrent des clés sur sa démarche, mais elles signalent une écriture vivante. A titre d'exemple : « Nous sommes le mur fait de pierres de silence tagué, de douleurs muettes et complices des remparts de l'indifférence. Les vrais murs ne sont pas aussi visibles… ». Autres murs, ceux de la Bibliothèque nationale d'Algérie que Messaouda Boutaba, spécialiste en bibliothéconomie, nous invite à traverser avec le parcours de 172 ans de cette institution créée en 1835. On y suit les pérégrinations de la bibliothèque dans la ville, de cette impasse du Soleil à Bab El Oued, à la Caserne des Janissaires, rue Bab Azzoun, puis à la rue des Lotophages dans la Basse Casbah jusqu'à son siège au Bd. Frantz Fanon, œuvre architecturale, audacieuse de modernité, entamée en 1955. Puis, atterrissage au Hamma dans l'actuel siège, au volume et aux allures prestigieuses, mais aussi fermé à ses environs que l'ancien était ouvert. Beaucoup de photos pour la période actuelle, certaines de mauvaise qualité ou sans grande signification, et trop peu d'informations sur le fonctionnement actuel de l'institution, son organisation, ses activités… L'ouvrage se rattrape largement avec sa principale partie où figure la collection des manuscrits, avec de nombreuses iconographies. Des merveilles, dont ce fameux Coran octogonal microscopique (3,9 cm en largeur maximum) qui remonte à l'an 1016 de l'hégire et passe pour le plus petit au monde. Signalons aussi cette Chronique algéroise (175 p), magnifique album de photographies de Halim Zenati, avec des textes de Waciny Laâredj. Une introspection vivante d'Alger, saisissante de spontanéité, exprimant les douleurs, les doutes, les joies et les moments simples de la vie auxquels le regard du photographe et la pertinence des prises de vue confèrent une dimension symbolique forte. Un livre qui se situe dans les années 70 et 80 et porte en lui une valeur de témoignage autant que la permanence d'une poésie d'Alger. Enfin, Boualem Titiche, ouvrage sur le maître de la zorna, figure de proue de la musique nationale et de la vie algéroise avec ses prolongements dans La Casbah, le club du Mouloudia, l'histoire, les traditions et fêtes… Œuvre de sa fille, Leïla Titiche, c'est un album de 170 p où les photographies en noir et blanc donnent au texte une illustration à la fois informative et émouvante. Avec ces cinq ouvrages, l'éditeur se positionne de manière probante sur le registre des beaux livres. NB : tous les livres sont bilingues à l'exception de Djazaïr (en fr.) et Boualem Titiche (en ar.).