La nouvelle et le roman syriens modernes appartiennent à quatre catégories essentielles. D'abord la fantaisie (très marquée par Abdesselem El Odjeïhi, (celui des Chevaux d'Andalousie) et l'autobiographie (où s'illustreront Hannah Mina et Hani Rahib…) Ensuite, l'histoire ancienne ou contemporaine : le combat contre le colonialisme ottoman, la guerre contre la domination française dont Nabil Souleïman en est le chantre ; l'histoire passée avec la trilogie de Khaïri Dhahabi (Hassiba, Hicham ou la tergiversation et Tarek) et enfin, la peinture sociale, le plus souvent…Des catégories qui n'excluent évidemment pas le roman psychologique traditionnel dont Khaïri Dhahabi est peut-être en ce moment le meilleur représentant. Abdesselem El Odjeïhi aurait affirmé que la seule autre personne pouvant prendre sa relève était Khaïri Dhahabi. Une phrase inattendue car les différences étant plus marquées de prime abord que les affinités. Khaïri Dhahabi est plongé dans « le nationalisme syrien » dont est pétrie son œuvre. Pour lui l'intelligence n'est pas une fin, le corps un empêchement. Sa vision de l'homme total récuse le cérébral et ignore la lutte puritanisme islamique mal vaincue. Surtout, quel trait commun trouverait-on entre la parole tendue et passionnée de Abdesselem El Odjeïhi et le sérieux poussé au paradoxe où les aphorismes d'un anarchisme bon enfant caractéristiques des passages les plus célèbres de Khaïri Dhahabi ? Abdesselem El Odjeïhi savait pourtant ce qu'il disait. A côté de ses compatriotes volontiers refermés sur leur histoire, Khaïri Dhahabi, comme Abdesselem El Odjeïhi, refuse le passé s'il doit nuire à l'avenir : (Les chutes de Yacine, 2007), et s'il doit fermer la porte au monde ; le « nationalisme étroit » cache sous le merveilleux poétique et la fantaisie verbale, gratuites seulement d'apparence, l'âme d'un satirique capable d'émotion, jamais coupable de sentimentalité.