Une réunion de sortie de crise s'est tenue hier à Berriane sous haute surveillance policière. Notables, toutes communautés confondues, élus APC/APW et représentants de l'administration étaient présents. Berriane (Ghardaïa). De notre envoyé spécial Il y avait également à cette rencontre, le wali de Ghardaïa, des représentants des familles touchées par les dernières violences, dont le frère cadet de Ali Lassakeur (mort lors des affrontements du 19 mars), et des délégués de partis politiques et du mouvement associatif qui se sont ensemble penchés sur ce conflit intercommunautaire. La rencontre, qui s'est déroulée à huis clos au siège de la daïra, a abouti, après d'âpres discussions parfois houleuses, nous a-t-on confié, à une série de mesures dont la création d'un « conseil de fraternité » qui regroupera les notables des deux communautés (mozabites et arabes) et tous les autres acteurs capables d'apporter leur contribution à restaurer la paix de manière définitive dans cette commune où vivent plus de 35 000 âmes. Ce conseil est doté de cinq cellules. Chacune d'elles prendra en charge un volet bien précis. La première regroupera les imams de la commune et aura pour mission d'éclairer et de sensibiliser les jeunes de Berriane sur les questions d'ordre religieux et de lever tout équivoque sur certains concepts qui parfois alimentent « la fitna », pour reprendre le qualificatif employé par l'un des notables qui a requis l'anonymat. La deuxième cellule, comme nous a expliqué Daddi Adoun, avocat et élu APW, rassemblera les politiciens de la région, la troisième est celle du mouvement associatif. Les deux dernières cellules s'occuperont de tout ce qui est lié à l'éducation, à la formation et à la sécurité. D'autres mesures ont été prises lors de cette réunion, dont l'installation d'une sûreté de daïra et d'une police de proximité dans la ville. Cette police de proximité axera son champ d'intervention dans les quartiers chauds. Sa mission est d'être constamment à l'écoute des citoyens. Aussi, le wali s'est engagé à indemniser les familles qui ont perdu leurs maisons ou leurs magasins (brûlés ou complètement saccagés) et dont leur nombre avoisine la trentaine. Les participants à cette rencontre, qualifiée d'historique et de cruciale pour l'avenir de toute la région de Ghardaïa, ont plaidé pour la paix, la tolérance, la fraternité et le dialogue. Dans la déclaration finale sanctionnant la rencontre, ils ont en effet dénoncé certains écrits publiés dans la presse nationale qui, selon eux, ont rajouté de l'huile sur le feu et créé une confusion totale dans l'esprit des gens. « Je ne ferai aucune déclaration à la presse. Nous avons eu assez de contrevérités, de canulars et de calomnies sur ces événements », a déclaré un notable qui n'a pas voulu nous donner son nom. Il faut souligner qu'il n'est pas le seul à refuser de parler à la presse. D'autres notables, qui ont vu leurs propos complètement déformés dans la presse, se sont, eux aussi, abstenus de faire la moindre déclaration. Leur seul souci demeure cependant le retour à une cohabitation entre tous les habitants de Berriane, quelle que soit leur appartenance politique, ethnique et religieuse. « Après tout, nous sommes des Algériens, cessons de semer la scission entre les enfants du pays », clamaient des voix discordantes au sortir de la salle où s'est déroulée la rencontre. Le retour à la vie normale, à la stabilité et la paix est le profond vœu de Hadj Ahmed Aboud, dont le magasin et la maison situés au quartier dit chaud de Kaf Hammouda ont été saccagés et incendiés, ayant lui aussi participé à cette rencontre de « fraternisation ». Cependant, M. Aboud craint que la promesse de l'Etat d'indemniser les sinistrés ne soit pas tenue dans les plus brefs délais. « Ma maison a été calcinée et mon magasin d'habillement complètement saccagé. Je n'ai plus rien », s'indigna-t-il. Ainsi, si l'ensemble des participants ont applaudi les résultats de la rencontre, certains d'entre eux expriment leur inquiétude quant au retard ou à la non mise en application de toutes les mesures prises lors de cette rencontre. Il s'agit, entre autres, de l'avocat Adoun qui se montre peu enthousiaste sur ce chapitre. « Nous saluons certes l'effort consenti de part et d'autre pour dégager toute une palette de mesures visant à ramener les choses à leur cours normal, mais nous attendons que ces mesures soient appliquées pour être totalement rassurés », nous a-t-il indiqué. Houari Lassakeur a tenu à cette occasion à apporter un démenti formel quant aux « allégations » colportées par certains médias sur les raisons du meurtre de son frère. Il affirme ainsi que le défunt Ali Lassakeur n'a pas été assassiné à cause d'une « relation douteuse » avec une femme appartenant à la communauté arabe, mais bien parce qu'il est Mozabite. Il demande ainsi à ce que justice soit faite. « Je n'aurai de cesse d'exiger à ce que le meurtrier de mon frère soit démasqué et traduit devant la justice », a-t-il soutenu.