Une feuille de route de 15 points a été signée hier par les représentants des ibadites et malékites, ainsi que par le wali de Ghardaïa et le ministre délégué chargé des Collectivités locales. Elle précède la charte de Berriane, qui sera consolidée l'été prochain et qui mettra fin à une situation de violence qui a fait 5 morts et des dizaines de blessés depuis un an. Ghardaïa De notre envoyée spéciale C'est à Ghardaïa et en présence des députés, sénateurs et membres de la commission de sécurité que les représentants des deux communautés ibadite et malékite, ainsi que le ministre délégué chargé des Collectivités locales, Dahou Ould Kablia, et le wali, Yahia Fahim, ont signé hier « la feuille de route » pour la réconciliation à Berriane, dans une cérémonie empreinte de beaucoup d'espoir et d'optimisme. Il s'agit, en fait, d'un document articulé autour de 15 points et devant servir de base à une consolidation de la paix entre les deux communautés à travers une charte dite de Berriane que les deux parties ont prévu de signer durant l'été prochain. La feuille de route, paraphée sous les projecteurs des caméras et des flashs, par Daoud Bourguiba, représentant des Mozabites, et Kouader Bachir, porte-parole du conseil malékite, engage ces derniers à multiplier les rencontres avec les différentes catégories de la population pour promouvoir la sécurité à agir pour mettre fin à la « fitna » (crise) en s'attaquant à ses causes, encourager le principe du dialogue et le respect mutuel des spécificités de chaque communauté, recenser tous les biens ayant été endommagés durant les événements et évaluer les dégâts tout en engageant les réparations et entreprendre les reconstructions avec des méthodes adéquates et limiter le programme dans le temps avec l'aide des deux communautés. Celles-ci se sont entendues également pour créer une ligue des associations de parents d'élèves de Berriane, pour accompagner l'Etat dans ses actions en direction de l'éducation en prévision des examens de fin d'année, à faire intervenir les deux instances représentant les deux communautés en cas de dépassement et tout autre action qui menace la cohabitation, à revoir la carte sécuritaire à travers tout le territoire de la commune de Berriane en se basant sur le dialogue et la concertation entre les deux parties signataires pour garantir la sécurité publique, isoler les différents individuels, éviter et interdire toute provocation ou agression collective ou individuelle et condamner tout acte de violence et dont les auteurs doivent être dénoncés aux services de sécurité, lesquels doivent agir d'une manière professionnelle. Ibadites et malékites ont déclaré être convaincus que la sécurité et la cohabitation sont l'affaire de tous et leur consolidation est du ressort de chacun des membres des deux communautés et doit passer par la prise en charge rapide des victimes des événements. Ils se sont engagés à faire la promotion de la culture de la paix, à faire face aux idées et actions extrémistes, à lutter contre les fléaux sociaux et à poursuivre le dialogue dans un cadre organisé pour éliminer toutes les causes de la crise et renforcer la concertation entre les représentants des deux communautés, les autorités locales, les élus de la commune de Berriane dans le but de définir les préoccupations des citoyens et les prendre en charge concrètement. Ce sont les 15 points que les parties ont adoptés après plusieurs réunions et débats depuis presque un mois déjà. En fait, selon quelques membres qui ont participé aux tractations, cette feuille de route n'est en fait que le résultat des efforts consentis depuis près d'un an, dès les premiers événements de la fête du Mawlid, au mois de mars 2008, puis repris après ceux d'octobre 2008, sans arriver toutefois à un consensus. C'est la première fois, peut-être parce qu'il y a eu trop de morts, que les deux communautés ont pris conscience qu'il faille s'entendre sur un minimum avant d'aller vers un véritable accord de cohabitation en paix. Lors de son intervention à la cérémonie de signature de cette feuille de route, le ministre délégué chargé des Collectivités locales, Dahou Ould Kablia, a qualifié l'événement d'historique, parce qu'« il va consolider la charte de Berriane », dont la signature est prévue prochainement. « C'est un document officiel puisqu'il porte non seulement la signature des représentants des deux communautés, mais aussi la mienne en tant que ministre délégué, désigné par le président de la République pour régler la crise, et le wali en tant que représentant de l'administration locale », a-t-il précisé. Le ministre délégué n'a pas manqué de souligner « les appels à la guerre civile, les pressions externes, les interférences marginales qui ne voulaient pas l'unité de la région et appelaient à la consécration du rite ibadite par la Constitution, comme si les ibadites n'étaient pas des musulmans », tout en indiquant que 8 rites constituent l'Islam, 4 sunnites, 3 chiites et 1 ibadite. « Cela fait des siècles que les ibadites vivent en toute harmonie parmi les sunnites, parce que c'est l'Islam qui les réunit. Des gens ont voulu politiser la crise afin d'envenimer le climat, mais la sagesse a prévalu. Cette feuille de route constitue les principes qui vont permettre l'extinction du feu afin que les deux communautés puissent réapprendre à vivre ensemble tout en prenant en compte l'aspect socio-psychologique de la crise. Les problèmes liés à la partialité du maire et du chef de daïra ont été sérieusement pris en charge de manière à ce que chacun de ses deux responsables soit neutre et agisse uniquement au service de la communauté dans le but d'éviter que de telles dérives ne se répètent et que nos enfants puissent aller à l'école et se préparer à leurs examens dans de bonnes conditions », a déclaré Daho Ould Kablia, avant de lancer aux nombreux notables : « Il n'y a pas d'autres villes pour les habitants que Berriane. Vous êtes obligés de vous entendre. » Abordant la question des dépassements commis par des policiers et filmés par des citoyens, le ministre délégué a indiqué qu'une enquête a été menée et que les auteurs, un policier et son chef direct, ont été sanctionnés. Il a conclu en disant qu'une nouvelle page a été ouverte à Berriane. Les deux parties ont été appelées par la suite à signer la feuille de route dans un climat serein et empreint d'optimisme.