Le ministre des Affaires étrangères, Mourad Medelci, a présenté hier à Genève un rapport devant le Conseil des droits de l'homme des Nations unies décrié par les ONG de défense des droits de l'homme. Invité à présenter un point de situation sur les droits de l'homme en Algérie, le chef de la diplomatie algérienne a tenu à souligner que « l'Algérie mène de front deux actions dont la plus urgente et la plus importante est la consolidation de la paix retrouvée après la longue et difficile période de troubles de la décennie 1990 ». Alors que les ONG internationales ont dénoncé le fait que les questions sensibles aient été éludées par le rapport algérien, M. Medelci insiste pour dire que la décennie passée est « une parenthèse douloureuse dont nous avons tiré beaucoup de leçons et que nous avons entrepris de fermer dans la solidarité et la réconciliation ». Evoquant le second front, le représentant de l'Etat algérien parle de « la poursuite de la refonte institutionnelle, structurelle et organique où la démocratie, les droits de l'homme et les libertés démocratiques, dans toutes leurs dimensions, sont aujourd'hui des acquis… ». Abordant le sujet des prisons secrètes, le ministre qui dément leur existence aura pour complément de réponse qu'« aucun centre de détention n'échappe au contrôle du juge, aucun n'échappe à la portée de la loi ». Et de dire, en parlant de demandes de visites dans les prisons des détenteurs de mandats, que certaines demandes en instance « pourraient être envisagées dans le contexte actuel pour autant que leurs termes de référence ne remettent pas en cause la décision souveraine du peuple algérien ». La situation d'état d'urgence est appelée à être maintenue, dira le même responsable en justifiant que cette mesure « n'a pas empêché la tenue d'élections régulières et la préservation de la légitimité des institutions ». Et d'ajouter qu'il « ne sera levé que lorsque les conditions ayant présidé à sa proclamation auront cessé d'exister ». Quant à la lutte contre le terrorisme, M. Medelci affirme que « l'Etat a tenu à se conformer à ses engagements internationaux et à agir dans le respect des droits de l'homme », et de préciser au sujet de l'exercice des cultes en Algérie que « des mesures ont été instaurées afin de prévenir les dépassements et les dérapages et assurer une saine compréhension de la religion ». Alors que la menace d'emprisonnement pèse encore sur les journalistes, le ministre affirme que la « presse algérienne est la plus libre dans sa sphère géographique » et d'assurer que « 87% des poursuites judiciaires intentées contre la presse ont été initiées par des particuliers qui s'estimaient victimes de diffamation ». L'évaluation de la situation des droits de l'homme en Algérie par le Conseil des droits de l'homme de l'ONU n'a pas été sans faire réagir les organisations non gouvernementales de défense des droits humains qui ont contesté l'éviction des questions fondamentales liées aux atteintes à ces droits. Contestant le nouveau mécanisme du Conseil d'évaluation qui permet aux pays de choisir les questions à traiter, la Fédération internationale des droits de l'homme a estimé que l'examen du cas Algérie a été « tronqué » justifiant cela par l'absence de réponses aux questions de l'impunité et les disparitions forcées. Il s'agirait, selon cette ONG, du même procédé de « hold-up » adopté par les pays arabes et ceux de l'Organisation de la conférence islamique qui confisquent le temps de parole au Conseil des droits de l'homme pour esquiver les questions sensibles. « Le bloc latino-européen a posé des questions se fondant sur les documents des ONG et du Haut commissariat aux droits de l'homme, et un second bloc composé des pays arabes et de l'OCI (Organisation de la conférence islamique) a tenté un hold-up du temps de parole et évité les problèmes majeurs des droits de l'homme », souligne la FIDH par la voix de Julie Gromellon. Cette dernière estime que les pays arabes ont déplacé le débat vers les questions des droits économiques et socioculturelles pour ne pas avoir à affronter les interrogations sur les droits civils et politiques. Des sujets qui ont été éludés dans le rapport présenté par Mourad Medelci qui a souligné que « malgré un contexte de crise qui a duré plus d'une décennie où la difficulté d'allier liberté et sécurité était omniprésente, l'Etat républicain a continué à fonctionner normalement ».