En stabilisant les concentrations de dioxyde de carbone dans l'atmosphère à 550 parties par million, le réchauffement devrait être de 3°C d'ici la fin du siècle. C'est sur ce constat que les experts mondiaux sur le changement climatique s'étaient quittés en février 2008. Un chiffre déjà dépassé, à en croire James Hansen, directeur du Goddard Institute for Space Studies (GISS), un des climatologues les plus influents, qui révèle, dans une étude à paraître, que le seuil véritablement dangereux serait plutôt de 345 ppm, une limite que nous avons déjà franchie depuis 1990. Et que par ailleurs, ce chiffre qui correspondrait au double des émissions de l'ère pré-industrielle, entraînerait une hausse de 6°C. Le décryptage de Mohammed Senouci, expert algérien du groupe intergouvernemental d'experts sur le climat. Pour la première fois, l'étude élaborée par J. Hansen et une équipe d'autres chercheurs remonte à 50 millions d'années en arrière. Ses données sur les évolutions au cours du paléolithique montrent que les modèles climatiques n'ont pas pris en compte des impacts comme la désintégration des glaces, la migration de la végétation ou encore les émissions de gaz à effet de serre en provenance des sols, des toundras ou des sédiments des océans et que ces phénomènes pourraient se manifester à des échelles de temps aussi courtes que des siècles ou moins encore. En d'autres termes, les scénarios de référence utilisés jusqu'à présent par le GIEC ne prenaient pas en compte ce que l'on appelle des “rétroactions lentes”. Il met en garde les pays qui sont en train de miser sur le développement de « charbon propre » en expliquant que les émissions ne sont pas aussi propres qu'on le pense et que beaucoup de dioxyde de carbone s'en dégage. Il préconise de supprimer progressivement tous les usages de la houille d'ici à 2020-2030. Si nous poursuivons le rythme actuel d'exploitation des énergies fossiles pour satisfaire l'appétit grandissant de modes de vie gourmands en énergies, nous quitterons bientôt le climat de l'holocène, la dernière époque géologique s'étendant sur les 10 000 dernières années pour nous retrouver sur une planète sans glace. Il incite les pays du sud à mener de manière urgente des opérations de reboisement pour lutter contre la désertification et séquestrer le CO2, et une politique agricole basée sur la fertilisation des sols à base de résidus de récoltes, des forêts et des déchets. Ceci signifie des modifications importantes des pratiques agricoles et des usages de la terre. Ceci pourrait conduire à une baisse de 8 ppm en un demi siècle. Il invite les Etats à se préparer sérieusement aux catastrophes en dégageant des budgets spéciaux. Le monde n'est pas préparé à une crise qui va durer. Nous ne devons plus penser aux principes de précaution mais à la réparation des dommages.