Quelle est la place de l'union pour la Méditerranée (UPM) aux côtés des autres mécanismes préexistants comme le processus de Barcelone ? Je partage l'avis et le point de vue du ministre des Affaires étrangères algérien, Mourad Medelci. Je pense que l'UPM est une grande idée, mais elle peut aussi devenir une grande occasion si seulement nous pouvons renforcer son contenu de projets concrets, réalisables, finançables. Autrement, ce projet restera comme tant de belles idées, une sorte d'occasion ratée. Pour ma part, je donne une grande importance à la réunion à Alger du forum méditerranéen, cela peut produire un noyau dur de propositions qui avec une seule voix porte un point de vue vers l'Europe. Je pense que l'investissement dans la zone méditerranéenne n'est pas un investissement comme les autres. C'est un investissement qui concerne le destin de l'humanité. Nous avons une seule arme contre l'ennemi qui est le terrorisme et le fanatisme idéologique : le développement. Il ne peut y avoir de paix sans développement. Mais comment peut-on dépasser les handicaps et les a priori qui ont miné les projets Nord-Sud ? Comment dépasser les problèmes des politiques de migration, de la paix au Moyen-Orient, etc. ? L'Europe porte une grande responsabilité. Dans les années de vaches grasses, l'Europe n'a rien fait pour diminuer les distances entre le Nord et le Sud. Mais on peut les dépasser avec la volonté, la passion et la politique. Est-ce ces trois facteurs qui ont, par exemple, fait défaut au processus de Barcelone ? Le processus de Barcelone est resté trop souvent au niveau des déclarations. Nous avons aussi nos responsabilités. L'Italie s'est un peu retirée de la politique internationale. Notre pays est passé une longue et difficile période de transition qui a fait sembler que le rôle de l'Italie était relativement moindre. Mais maintenant, le gouvernement italien, et moi personnellement, nous nous engageons à ce que l'Italie redevienne un pays qui marque l'histoire en tant que nation occidentale et en tant que nation méditerranéenne. Quels seront, en priorité, les contenus à proposer pour concrétiser l'UPM ? La priorité est d'identifier les modes de financement des projets, comme la création d'une grande banque méditerranéenne d'investissement, une idée qui fait son chemin en Italie. Mais des pays du Sud maintiennent leur scepticisme à cause des questions des politiques migratoires... Je voudrais tout d'abord rassurer les lecteurs d'El Watan : les récentes mesures prises par le gouvernement italien concernant la politique de migration sont des mesures de bon sens qui tiennent compte aussi bien de la sécurité que du souci d'intégration. Il n'y aura jamais de sentiments xénophobes de la part d'un peuple qui connaît que très bien les sentiments des personnes qui émigrent. En second lieu je pense que tôt ou tard, il faudra inverser l'approche envers l'immigration. Car jusqu'à présent, il s'agissait d'une urgence. Il faudra maintenant que l'immigration devienne une ressource : une occasion pour les pays du Sud pour offrir des opportunités de travail et une ressource pour les pays d'accueil qui ont besoin d'une main-d'œuvre qualifiée. Ceci pourrait se réaliser en travaillant énormément sur la formation et les échanges réciproques entre les pays. Quelle approche avez-vous concernant la lutte antiterroriste et la coopération dans ce domaine ? Il faut donner des signes d'espoir aux gens, c'est à ce moment qu'on fragilise le terrorisme. Il y a, dans le domaine de la lutte antiterroriste, un travail pratique et concret à faire, notamment entre nos ministères respectifs de l'Intérieur. Je cite par exemple les échanges de renseignements et d'expériences. Le gouvernement italien apprécie beaucoup le travail que fait l'Algérie dans la lutte contre le terrorisme. Cette coopération peut nous permettre de lutter ensemble contre ce phénomène terrible qui est notre ennemi commun. Avant Alger, vous avez été à Tunis, qu'avez-vous reçu comme message des dirigeants que vous avez rencontrés ? J'ai relevé que nous partageons les mêmes préoccupations avec les dirigeants du Maghreb que nous avons rencontrés. Et si je puis me permettre, ils sont beaucoup plus préoccupés que nous !