Oublié par les responsables culturels de son propre pays, Kamel Hamadi, poète, compositeur et chef d'orchestre kabyle, a été désigné par le président français, Nicolas Sarkozy, chevalier de la légion d'honneur. La cérémonie de remise de la distinction aura lieu dans quelques jours au palais de l'Elysée, en présence de nombreux artistes algériens et d'amis. C'est par courrier postal que Kamel Hamadi a appris la bonne nouvelle. « Honnêtement, je ne m'attendais pas à pareille surprise, mais je suis flatté », a-t-il indiqué par téléphone à El Watan. « Cette distinction est la consécration de 55 années de travail et de créativité. C'est aussi une reconnaissance de tous les artistes qui ont interprété mes œuvres et mes poésies. » Né en 1936 à Aït Daoud, un petit village niché aux pieds du Djurdjura dans la commune d'Iboudrarène, la vie de Kamel Hamadi est intimement liée à la musique. Non seulement, il a chanté ses propres chansons, mais il a composé pour de grands noms reconnus aujourd'hui tels que Aït Menguelet, son voisin d'Ighil Bouamass, ou Akli Yahiatène, sans oublier Hnifa, Nouara, Nora et de nombreux artistes de l'exil. Il a également écrit des opérettes, fait des pièces de théâtre. Il s'est aussi employé à ouvrir les chemins tortueux du chant et de la musique à des dizaines de jeunes talents d'expression berbère et arabe. En 1942, quand Kamel Hamadi quitte sa Kabylie natale, c'est tout naturellement à Alger qu'il « atterrit ». Là, il se met à fréquenter les milieux artistiques, les amoureux du chaâbi (musique populaire algéroise) et fait son entrée à la Radio algérienne où il contribue à densifier les programmes de la chaîne kabyle avec de nombreux compères comme cheikh Noureddine et Saïd Hilmi. Compositeur, arrangeur, poète, chef d'orchestre, acteur, le fils d'Aït Daoud a joué tous les rôles et gravi tous les échelons du métier. Un à un, sans brûler les étapes, car ce qui l'intéresse par dessus tout c'est le travail bien fait, propre et digne d'être reconnu par l'histoire et par ses pairs. Kamel Hamadi a toujours refusé les honneurs et n'aime pas les courbettes. Sa seule satisfaction, il la trouve dans les succès qui couronnent ses multiples réalisations. « Je n'attends pas de récompense, car tout ce que je fais est guidé par l'amour que j'ai pour mon métier. Et tant que je serai vivant, je continuerai à faire des choses. » Artiste prolixe, connu et aimé de tout le monde, humble et avenant, il a connu l'histoire de la musique algérienne sur les bouts des doigts. Il n'y a pas un bon disquaire algérien qui ne possède pas ses œuvres. En Algérie, il regrette l'inexistence du statut de l'artiste et le dénuement dans lequel vivent plusieurs de ses confrères. En France, il savoure un titre qui le réconcilie davantage avec sa première amoureuse : la musique.