Sous les grands acacias, le campement jihadiste dans cet oued asséché au nord de Gao était invisible du ciel. Et ce n'est sans doute que quelques heures avant l'arrivée des soldats français qu'il a été déserté. Progressant à pied, en formation de combat quelques mètres devant les blindés dans le fond de la vallée, les hommes du 92e régiment d'Infanterie ont, au deuxième jour de l'opération "Gustav", découvert des stocks de munitions, des restes de bivouacs, des équipements de camping et des fûts de carburant attestant d'une forte présence ennemie. Un millier de soldats français appuyés par de nombreux blindés et protégés par une importante couverture aérienne ont dimanche à l'aube encerclé puis investi cette vallée, considérée par l'état-major de l'opération Serval comme l'une des bases principales du groupe islamiste Mujao (Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest). Le capitaine Arnaud (il ne révèle que son prénom) note les points GPS de toutes les découvertes de ses hommes. Les instructions sont de ne rien toucher, au cas où ce serait piégé, et d'attendre les spécialistes du Génie. "Ils ont quitté les lieux précipitamment, sans doute informés de nos mouvements dès que nous avons quitté Gao", dit-il. "Ils ont laissé derrière eux des tas de choses qu'ils emportent quand ils bougent de façon ordonnée. Ils étaient pressés". Il montre, sous le couvert de branchages touffus, des lits pliants, des ustensiles de cuisine, des vêtements, des fûts de 500 litres de carburant, des morceaux d'armement. Une grande cantine contient le début de ce qu'il faut mélanger pour fabriquer de l'explosif artisanal: semoule, gasoil et engrais. Les sapeurs répandent la matière grumeleuse sur le sol, crèvent la cantine à grands coups de pioche. Ils brûlent le reste. Deux hélicoptères d'attaque Tigre tournoient dans le ciel et surveillent le terrain à l'avant des fantassins. Des chars et des canons de gros calibre veillent sur les crêtes. Plus loin, dans une caisse en bois portant des inscriptions en français, une radio HF d'un modèle ancien, sans doute volée à l'armée malienne.