Le Mali organisera bientôt "des assises nationales du Nord", discussions destinées à permettre "le règlement définitif" des rébellions récurrentes dans cette partie du pays depuis son indépendance, a annoncé lundi le président Ibrahim Boubacar Keïta, sans fournir de date. "Il nous appartient de régler définitivement la question du Nord en forgeant une paix durable fondée sur la confiance entre toute les composantes de la Nation malienne", a déclaré le président Keïta lors de la première réunion avec son Premier ministre Oumar Tatam Ly et son gouvernement, lundi matin à la présidence à Koulouba (près de Bamako). Sa déclaration a été diffusée dans la soirée par la télévision publique malienne ORTM. "Dans les jours à venir, nous engagerons sans tarder des actions en vue d'organiser les assises nationales du Nord, qui permettront (...) de forger un consensus national favorisant le règlement définitif du problème dit du Nord", a-t-il ajouté. Depuis son indépendance, en 1960, le Mali a connu plusieurs rébellions touareg, dont la dernière en date, déclenchée entre fin 2011 et début 2012 par le Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA), a ouvert la voie à la crise la plus grave de l'histoire du pays. Vivant essentiellement dans le Nord, la communauté touareg - quelques centaines de milliers de personnes sur une population totale d'environ 15 millions d'habitants - s'estime mise à l'écart du développement du reste du pays. Le MNLA, allié à divers groupes armés dont des jihadistes, a lancé en janvier 2012 des attaques contre l'armée dans le nord du Mali, qui ont servi de prétexte à des militaires pour renverser le 22 mars 2012 le président Amadou Toumani Touré en l'accusant d'incurie dans la gestion de cette offensive. Le putsch a précipité la chute du nord du Mali aux mains des groupes armés. Les jihadistes ont fini par évincer du terrain leurs ex-alliés touareg et ont occupé ces régions pendant plusieurs mois en 2012, avant d'être chassés à partir de janvier 2013 par une intervention militaire franco-africaine. La rébellion touareg et l'occupation jihadiste ont exacerbé les tensions entre les différentes communautés, Touareg et Arabes étant souvent assimilés par certains à des rebelles et jihadistes. Elu le 11 août pour un mandat de cinq ans, le président Ibrahim Boubacar Keïta a fixé comme "priorité la plus pressante" de son quinquennat "la réconciliation nationale" lors de sa prestation de serment, le 4 septembre. Lundi, M. Keïta a invité ses Premier ministre et ministres à se préparer pour une tâche ardue. "Il ne s'agit pas d'une sinécure car nous avons l'exigence de satisfaire exclusivement les exigences fondamentales de notre peuple qui a subi au cours des mois écoulés un traumatisme profond. (...) Il nous faut rebâtir de nouvelles institutions", a-t-il estimé. Parmi les autres priorités de son régime, il a aussi évoqué "une justice saine, qui soit égale pour tous", et "une lutte conséquente contre la corruption". "La réhabilitation de la justice sera au coeur du projet de refondation de nos institutions, d'où la place éminente accordée à ce département", a-t-il dit. Le nouveau ministre de la Justice est un avocat, Mohamed Ali Bathily Justice et, fait inédit au Mali, il est le premier dans l'ordre de préséance après le chef du gouvernement. Lundi à Paris, le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, Philippe Lalliot, a salué la formation du gouvernement malien. "Nous notons avec satisfaction que, conformément aux déclarations du président Keïta, la justice et la réconciliation constituent une priorité pour les nouvelles autorités maliennes", a déclaré M. Lalliot. Il a réaffirmé que Paris "restera aux côtés du Mali pour relever les grands défis que seront notamment la restauration de l'Etat, l'amélioration de la gouvernance, de la sécurité et le développement du pays".