Abdoulaye Wade, 85 ans, le président sortant, sollicite un troisième mandat. « Candidature illégale », crient ses 13 rivaux en lui rappelant que lors de sa réélection en 2007, il avait promis que, conformément à la Constitution, il ne se représenterait pas. Pour le faire savoir, ils organisent des manifestations. Ses partisans soulignent que des réformes de la Constitution en 2001 et 2008 lui donnent le droit de se représenter. Pour les observateurs, le pays de Léopold Sedar Senghor pourrait plonger, après les premières violences qui ont fait 15 morts et 539 blessés, selon l'opposition, dans l'incertitude à l'issue du premier tour. Surtout si les discours guerriers continuent à se multiplier. « Inquiet », Ban Ki-moon appelle à des élections pacifiques « paisibles, crédibles et transparentes ». Olusegun Obasanjo, l'ancien président nigérian qui conduit la mission des observateurs de l'Union africaine et de la Communauté économique et monétaire des Etats d'Afrique de l'Ouest, tente de décrisper la situation et de calmer les ardeurs d'une opposition déterminée à déboulonner Wade par « tous les moyens ». Elle propose une « feuille de route » au président sortant qui est donné favori par tous les sondages : quitter le pouvoir dans 2 ans s'il est réélu. Le Mouvement du 23 juin (MoM23), la coalition des partis d'opposition et d'organisations de la société civile qui mène le bal de la protesta, prend acte de cette proposition. Elle demande des garanties au président Obasanjo. Abdoul Aziz Diop, un responsable du MoM23, doute que « le président Wade joue le jeu ». Son grand souhait pour l'heure, « que Wade perde la présidentielle et que les Sénégalais aillent voter massivement en ignorant le bulletin de vote du candidat de trop ». Le collectif de jeunes « Y'en a marre » appelle à voter massivement « tout sauf Wade ». « Nous sommes disposés à discuter de toutes les questions », affirme Serigne Mbacké Ndiaye, le porte-parole de la présidence sénégalaise, convaincu que Wade va remporter les élections dès le premier tour, « une perspective jugée mathématiquement impossible » par l'opposition qui menace d'« enflammer » la rue et d'imposer au président « demain une solution non africaine ». Comme Wade, il ne semble pas avoir convaincu que les Sénégalais, qui ont vu en 2000 le président sortant incarner le « changement », veulent le changement depuis 2011, date du projet de réforme constitutionnelle que la présidence a retiré sous la pression de la rue (élection en même temps d'un président et d'un vice-président avec un minimum de 25% des voix au premier tour).