Les attentes deux parties ne sont pas très compatibles. La Cédéao conçoit que le rôle de la Micéma, c'est-à-dire de sa force de 3.300 hommes, une fois déployée, sera d'assurer la sécurité et la stabilité à Bamako où siègent les organes de transition et d'aider l'armée malienne à renforcer ses capacités. Les autorités maliennes veulent voir cette mission à l'avant-garde du combat pour la reprise à Ansar Dine et au Mouvement pour l'unicité et le Jihad en Afrique de l'Ouest, des deux tiers du pays au Nord. Dans certaines capitales de la Cédéao, on commence à se demander si Dioncounda Traoré, le président de transition, qui avait promis, en juillet 2012, à ses interlocuteurs de la région de donner son feu vert à une intervention militaire « dès la mis en place du gouvernement d'union nationale » tiendrait parole. Les raisons ne manquent pas. Outre ces « attentes », il y a une réalité indéniable : le véritable pouvoir n'est pas à la présidence mais la primature et à Kati, les casernes des putschistes. Deux centres de décision qui ne veulent pas de militaires étrangers pour régler la situation dans leur pays mais un appui logistique et technique. La Micéna, au point mort ? Oui, pour Bamako. Non, pour la Cédéao qui estime que la présence de groupes terroristes au Nord du pays en fait une question internationale. Comme pour montrer sa « tutelle », l'organisation régionale demande au nouveau gouvernement de prendre « sans délai les mesures nécessaires » pour « assurer la stabilisation de la transition, le rétablissement de l'unité et de l'intégrité territoriale du Mali et la conduite d'élections libres, équitables et transparentes au cours de la période de transition ». A Bamako, où les priorités sont toutes autres - même si « la priorité, c'est la reconquête, c'est la libération du Nord des forces d'obscurantisme qui l'occupent actuellement », affirme Tièman Coulibaly, le nouveau chef de la diplomatie malienne, Cheïck Modibo Diarra, le Premier ministre reconduit, s'offre un cabinet parallèle. Il nomme trois membres du précédent gouvernement (l'ancien ministre des Affaires étrangères, Sadio Lamine Sow, l'ex-ministre de la Communication, Hamadoun Touré, et l'ex-ministre de la Jeunesse et du Travail, Mamadou Diakité) à des postes de conseillers spéciaux, avec rang de ministre. Objectif de cette décision qui a provoqué le courroux du Front uni pour la défense de la République et de la démocratie (40 partis politiques opposés au putsch) : consolider son pouvoir avant la « concertation nationale » sur la transition qui se tiendra en septembre prochain et l'élection présidentielle qui donnera une certaine légitimité à celui qui va se charger de libérer le Nord du pays. L'équation malienne n'est pas près d'être résolue.