«La situation en matière de sécurité se dégrade en Afghanistan où l'insurrection ne cesse de gagner en étendue et en intensité » estime Ban Ki-moon, le secrétaire général des Nations unies. Dans un rapport soumis au Conseil de sécurité, il indique que le nombre de bombes artisanales placées par les talibans a bondi de 94 % de janvier à avril derniers comparativement à la même période en 2009. Selon Ban Ki-moon, les attentats suicides se produisent en moyenne trois fois par semaine, en majorité dans le sud pachtoune, bastion des talibans et 7 civils sont assassinés en moyenne par semaine. Soit une augmentation de 45 % par rapport à la même période en 2009. En raison probablement des opérations militaires internationales dans le sud, « le nombre d'incidents de sécurité a augmenté de manière significative par rapport aux années précédentes », ajoute ce rapport qui réconforte un constat établi depuis 2001 : la résurgence de l'insurrection des talibans établit chaque année un nouveau record de pertes pour les civils et les troupes étrangères et contredit celui du général David Petraeus, le chef d'état-major général de l'armée américaine, devant le Sénat. Le patron des forces américaines fait état de progrès « lents mais constants » en Afghanistan. Vendredi dernier, Hillary Clinton a fait état elle aussi « des progrès ». « Je pense que nous faisons des progrès », dit-elle estimant, après avoir évoqué des « indicateurs positifs » dans l'éducation, la santé, la croissance économique et souhaité « plus de résultats » des réformes promises par Kaboul que la police et l'armée afghanes « s'améliorent ». Comme pour contrer le rapport onusien avant sa publication, le général Josef Blotz, porte-parole de l'Otan, a réaffirmé samedi que les forces internationales enregistraient des succès sur le terrain. « Les combats devraient se poursuivre, mais la situation tourne en notre faveur au fur et à mesure que des forces supplémentaires sont envoyées dans la zone sud », dit-il saluant l'arrivée des renforts américains (30 000 soldats) comme une bouffée d'oxygène à l'Otan qui a engagé une course contre la montre contre les taliban qui reprennent du terrain. Cet optimisme des « va-t-en-guerre », peu de responsables à l'Otan et au Congrès qui finance le conflit, le partagent. Des officiels des « services de renseignement » des 26 pays de l'Alliance estiment que les talibans pourraient prendre le pouvoir dans un an « si le rythme de la guerre n'est pas renversé ». A Washington, les démocrates du parti de Barack Obama sont sceptiques. Face au discours peu rassurant des Américains qui n'envisagent aucun début de désengagement des « boys » et des Nations unies, Hamid Karzai qui sait qu'il est à la tête d'un pays assis sur des centaines de milliards de dollars, cherche d'autres alliances, y compris avec les ennemis des Etats-Unis dont il ne jouit plus de la confiance. Outre sa main tendue aux talibans, il se réconcilie avec le Pakistan, l'Iran, le Pakistan, la Chine et les Républiques d'Asie centrale. Les Américains qui savent pourquoi ils ont lancé leur offensive en 2001 sous couvert d'une exportation de la démocratie au peuple afghan : le rôle stratégique de l'Afghanistan, situé au cœur de l'Asie, et la culture du pavot, lèvent un pan du voile sur leur troisième raison : la richesse du sous-sol afghan qu'ils comptent bien « vendre » aux enchères le 20 juillet prochain à Kaboul lors d'une conférence internationale.