Qui parle de cinéma à Oran a souvent les yeux tristes ! C'est comme une corde de bonheur brisée aux mains du guitariste. Parce que qui parle de bonheur, il ne faudrait pas qu'il fasse revivre la douleur. Et la douleur a, précisément, été ravivée à Oran. Elle est présente, notamment, sur l'écran du principal cinéma d'Oran, Qâat Es-Silima « Es Saâda », ce cinéma d'honneur qui est consacré au concours du film long métrage. « Es Saâda », le « bonheur » ! La douleur, la souffrance et la présence humaine sont présentes. Tout au long des films. C'est qu'au fur et à mesure des choix, il se déroule des films horribles, humains, très terre à terre, parce que vus d'un angle à hauteur d'homme. Une vision aérienne qui a tout emprunté aux territoires des humains. Et cet appel du pied de la commissaire du festival, Mme Rabéa Moussaoui, qui conjure. « Jaime l'Algérie et j'aime ceux qui travaillent pour cet amour. L'Algérie avant tout ». Le comité de présélection a décidé que sur les 174 films proposés, seulement 14 devaient être retenus. Un regard au programme pour s'en rendre compte. 14 films. 14 succédanés de la douleur et de la souffrance. Des films à la recherche du même port en arpentant des sentiers différents. Sauf que les ressacs de la vie ramènent sur les plages humaines les mêmes corps. Abandonnés. Endoloris. Disloqués. Huant, vainement, à la recherche de la terre promise. A la recherche de cette part de bonheur qui n'existe que là où il y a des cœurs qui suent. Sang et or. De « Parfums d'Alger » à « Quand je t'ai vu », en passant par « Yemma », « Dernier vendredi », « 33 jours », « La cinquième corde »... Des départs forcés, des retours en catastrophe, des appels du sang, des offrandes à l'amour filial, partout la douleur et les souffrances. Celles dues aux hommes et à l'incongruité du destin. Et dans ces parcours humains, accidentés, la main de la vie et les petitesses des existences laissent des traces sur les écrans noirs du cinéma d'Oran. Tous ces films disent suffisamment la détresse humaine, et c'est un premier objectif atteint par le festival d'Oran. Rabéa Moussaoui, Halima Henkour, Bouziane Ben Achour et, surtout, Hadj Miliani peuvent travailler en paix. Ils ont réussi à rassembler un panel de films qui disent absolument le cœur déchiré des humains. Des films à voir. Absolument. Au cinéma « Es Saâda », le bonheur des hommes est absent. Pas celui des cinéphiles.