L'interdiction du port du niqab qui fait débat dans plusieurs pays européens, comme la France et la Belgique, pourrait faire tache d'huile en Espagne. Même si la secrétaire d'État à l'Immigration Anna Terron écarte cette éventualité au nom d'une concentration du gouvernement «sur les problèmes réels». Plusieurs villes de Catalogne, l'une des deux régions les plus peuplées du pays, envisagent de partir en croisade contre le niqab au moins dans tout l'espace public. Neuf municipalités ont interdit ces dernières semaines le voile intégral dans les édifices publics, pas dans la rue. Barcelone pense les suivre. Des sénateurs prévoient de présenter une motion au Sénat pour poser cette «interdiction du voile», véritable expression d'une «peur diffuse face à la différence». L'Espagne ne peut continuer de «s'abriter derrière le politiquement correct» et «rester en marge du débat européen», disent-ils. Le gouvernement de José Luis Rodriguez Zapatero hésite à trancher cette question qui transcende les clivages politiques. Son gouvernement est partagé entre deux de ses marques d'identité : la défense de l'égalité hommes-femmes, et le respect des cultures qu'il promeut internationalement à travers son initiative de «Dialogue des civilisations» entérinée par l'ONU. La ministre de l'Égalité, Bibiana Aido, juge «nécessaire une régulation générale du voile intégral». Son collègue de la Justice, Francisco Caamaño, préconise de restreindre l'usage du voile intégral dans les lieux publics dans sa loi en préparation sur la «liberté de religion». La puissante église catholique espagnole défend le port du voile intégral au nom de la Constitution qui stipule : «Les personnes et institutions ont le droit de manifester leur croyance, dans la limite du respect de l'ordre public». Amnesty International s'est prononcé mardi contre l'interdiction, au nom de la liberté religieuse et d'expression, jugeant que ce n'est pas le moyen adéquat pour les États de remplir leur «obligation de protéger les femmes contre l'imposition du voile intégral». La population issue de pays musulmans, qui a explosé depuis les années 1990, elle représente 2 million de personnes, sera-t-elle stigmatisée ?