Du bon vieux blues à la sauce roots et rythme and blues. Un régal. Face à un public venu très nombreux, l'enfant prodige du blues américain s'éclate sur scène. Décontracté, charismatique et drôle, il est un véritable homme orchestre. Quel que soit l'instrument, le jeu de Peterson qui saute aisément de ses deux claviers (orgue, piano) à sa guitare, est très technique et excitant. C'est son groupe (composé de Shawn Kellerman à la guitare, Tim Waites à la basse et Raul Valdes à la batterie) qui anime le premier quart d'heure du concert. Kellerman enchaîne des solos de guitare et annonce déjà la couleur de ce qui va suivre. Lorsque l'enfant de Buffalo fait son apparition, c'est magique, c'est surprenant et c'est surtout musical. Le multi-instrumentaliste qu'il est entre en action et se pose comme une bête de scène avec sa voix chaude et basse. Il enchaîne différents morceaux, changeant à chaque fois de rythme, ce qui a donné lieu à un genre de blues inspiré tantôt du hard-rock, tantôt du jazz rythmé et du soûl classique. Grosse première chanson, grosse présence. Le bluesman reprend magnifiquement le titre « Trouble » de Ray La Montagne, Peterson était aussi venu pour s'amuser n'hésitant pas à chambrer aussi bien le public que ses musiciens. Un vrai show de blues avec plein de surprises. La complicité est de rigueur entre lui, son groupe et sa femme, qui le rejoint plus tard. On sent immédiatement que les artistes étaient là pour se faire plaisir et amuser la galerie. C'était notamment le cas, lorsque Peterson descend dans la fosse, muni de sa guitare, se faufile au milieu de la foule, fait le tour de la salle en délire, monte au premier étage de la salle et fait son show à partir du balcon. Une randonnée de dix minutes. Les agents de sécurité étaient dans tous leurs états. Le public était aux anges. Autre grand moment du concert, lui et sa femme invitent deux enfants à monter sur scène et faire les chœurs sur le titre Ain't nobody de Chakah Khan. Sa femme le rejoint sur scène et l'ambiance monte et descend entre blues, fuk et rock. Le couple reprend principalement les compositions des albums Darling forever, (I don't like you but I love you, Talkin bout love) et bien sûr You can always turn around le standard blues Why are people like that. La recette est la même : humour, improvisation et un blues unique. Rappelons que Lucky Peterson est rapidement devenu, avec Robert Cray, le plus connu des jeunes bluesmen à la fin des années 1980. Agé aujourd'hui de 49 ans, il a une dizaine d'albums à son actif, son dernier opus sorti en 2010 est salué par les critiques US. Les organisateurs l'ont promis, cette année le public du Dimajazz a eu droit à du lourd. Constantine mérite amplement son titre de ville mondiale du jazz, choisie dernièrement par l'Unesco. En plus de Lucky Peterson, des stars mondiales ont défilé au TRC. On pense notamment à Al Di Meola, Macha Gharibian, Chucho Valdes, Aziz Sahmaoui and University of gnawa, Rabih Aboukhalil, Randy Brecker. Nous avons interrogé quelques chanceux qui ont suivi plusieurs soirées du Dimajazz et leurs avis divergent : « Le programme est d'une grande qualité cette année, nous avons apprécié les concerts d'Al Di Meola ou Aziz Sahmaoui. Bonne continuation et on espère que l'année prochaine il y aura d'autres surprises » souhaite Hichem, étudiant. Quant à Nawel, enseignante à l'université, elle est quelque peu frustrée de ne pas pouvoir assister à tout le festival : « Les organisateurs ont mal informé les gens, les billets ont été mis en vente une semaine avant le festival sans qu'on le sache. Beaucoup de mes amis n'ont malheureusement pas pu assister aux meilleures soirées. » Notons que cette année les organisateurs du festival n'ont pas mis en vente les abonnements pour toutes les soirées du festival, et ce, afin de permettre à un maximum de personnes d'assister et d'éviter aussi que des places restent vides. C'est en tout cas ce que nous a expliqué le commissaire de la manifestation, Zohir Bouzid. Les billets de certaines soirées, notamment celle d'Al Di Meola, ont été chèrement revendus au marché noir, 3.000 DA à 4.000 DA au lieu de 500 DA, selon nos informations.