La forte mobilisation (qui a réuni 15 millions de signatures), que les opposants au président égyptien Morsi, regroupés au sein du Front du Salut, s'apprêtent à lancer, le 30 juin prochain, avec pour slogan « le départ du président », n'a pas été sans soulever les craintes de l'institution militaire. Le ministre égyptien de la Défense, Abdel Fattah Al Sissi, est monté, dimanche, au créneau pour mettre le holà à ce grand déballage politique qui risque de replonger le pays dans les travers de la transition. Il a menacé l'opposition, sans la citer, de faire intervenir ses troupes « si des heurts éclataient dans le pays à l'occasion de ces rassemblements ». « Les forces armées ont le devoir d'intervenir pour empêcher l'Egypte de plonger dans un tunnel sombre de conflits et de troubles », a-t-il déclaré. Craignant que la situation ne débouche sur un conflit confessionnel, le ministre a appelé les deux parties à mettre de côté leurs clivages soulignant qu'il est du devoir de l'armée d'empêcher le chaos et l'effondrement des institutions. Les propos du ministre ne sont pas fortuits. Quatre citoyens d'obédience chiite ont été tués par une foule hostile dans un village du gouvernorat de Guizeh, près du Caire. Les victimes refusaient d'obtempérer à la foule qui leur demandait de quitter une maison dans laquelle ils s'étaient réunis, avant de les encercler et lyncher. Les chiites égyptiens sont régulièrement visés par des discours hostiles de la part de prédicateurs islamistes radicaux, qui les accusent d'être sous l'influence de l'Iran. Le Premier ministre égyptien, Hicham Qandil, a vivement condamné, hier, ce « crime haineux » qui est « incompatible avec les principes et les enseignements de notre religion tolérante ». Ce crime aux relents confessionnels dénoncé par l'armée et la classe politique, intervient au moment où le parlement approuvait une loi électorale destinée à régir les élections législatives. Le Conseil choura (Chambre haute) a accepté d'augmenter le nombre des membres de l'Assemblée du peuple (Chambre basse) à 588 et celui des sièges de certains gouvernorats sous représentés à six.