A deux semaines d'une présidentielle censée amorcer la réconciliation et rétablir l'ordre constitutionnel, l'administration malienne peine à se redéployer à Kidal, une ville soumise à de vives tensions entre l'armée malienne et la rébellion touarègue. Pis, depuis le 5 juillet dernier, date du retour de 156 soldats de l'armée régulière, les tensions entre communautés n'ont pas cessé de croître. Les incidents entre l'armée malienne et le Mouvement national de libération de l'Azawad, aussi. La première accuse le MNLA de violer l'accord de paix de Ouagadougou. Celui-ci exige la libération de 700 de ses détenus et le départ des « milices » anti-touareg conformément à cet accord. Une question est sur toutes les lèvres au Mali : une présidentielle pourrait-elle se tenir de façon apaisée dans une partie du pays où chaque camp veut faire la peau à l'autre ? Le colonel Adama Kamissoko, gouverneur de cette ville du nord, qui a regagné son poste pour marquer formellement le retour de l'administration centrale après un an et demi d'absence et préparer l'élection du 28 juillet, en est reparti quelques heures après, « par l'avion qui l'a amené de Bamako ». La raison ? Il a trouvé les locaux du gouvernorat occupés par des groupes armés. Depuis jeudi, une autre question se pose avec acuité : le prochain président sera-t-il légitime si Kidal ne vote pas ? Sur les 28 candidats, 7 se sont constitués en comité pour demander, ce lundi à la Cour constitutionnelle, de reporter la date de l'élection. Outre la situation à Kidal, ils évoquent l'absence des listes électorales et le vote des 500.000 réfugiés et déplacés . Un report qui ne réglerait rien, selon Dioncounda Traoré, président par intérim. « Il ne saurait y avoir d'élection parfaite, encore moins dans un pays en sortie de crise » leur répondit-il convaincu que « les imperfections du processus électoral peuvent être compensées par l'esprit civique, patriotique, des électeurs, des candidats ». Romano Prodi, l'émissaire de l'ONU au Sahel, s'est dit inquiet mercredi. « Nous allons avoir des incidents, et il s'agira d'être prêt à y faire face. Ce dont les Maliens ont besoin, et au plus vite, c'est d'un président légitimement élu », estime Hervé Ladsous, patron des opérations de maintien de la paix de l'ONU, tout juste rentré à New York.