Dix-sept attentats coordonnés à la voiture piégée ont frappé hier matin l'Irak. Bilan : 48 morts et 220 blessés, pour la plupart des chiites. A Bagdad, 11 voitures piégées ont explosé dans 8 quartiers différents, dont au moins 6 à majorité chiite, faisant près de 34 morts et plus de 130 blessés. Une dixième voiture piégée a explosé à Mahmoudiya, à 30 kilomètres au sud de la capitale, tuant au moins 2 personnes et blessant 25 autres. Deux voitures piégées ont également explosé dans le centre de Kout, une ville à majorité chiite, à 160 kilomètres au sud de Bagdad, faisant au moins 7 morts et 57 blessés. Toujours au sud de la capitale, deux autres attentats à la voiture piégée se sont produits à Samawa, une autre ville chiite, à 280 kilomètres de Bagdad, faisant au moins deux morts et des dizaines de blessés. Et une voiture piégée a explosé à Bassora, la ville portuaire dans le sud du pays, là aussi à majorité chiite, faisant un mort et six blessés. Au total, plus de 780 personnes ont été tuées dans les violences depuis début juillet, et plus de 3.000 depuis le début de l'année. Depuis près de trois mois, les bilans sont repartis à la hausse, revenant au niveau de 2008, au sortir d'une quasi-guerre civile entre sunnites et chiites, qui avait fait des dizaines de milliers de victimes en 2006-2007. Des groupes liés à al Qaïda semblent en grande partie responsables des récents attentats, commis probablement dans le but de relancer la guerre civile, selon les observateurs. Il y a une semaine, l'Etat islamique en Irak et au Levant, figure de proue d'al Qaïda en Irak, a revendiqué deux attaques spectaculaires contre deux des principales prisons du pays. Celles-ci ont permis l'évasion de plus de 500 détenus, dont des chefs d'al Qaïda. Cette flambée de violence montre, selon certains analystes, l'incapacité du gouvernement du Premier ministre chiite Nouri Al-Maliki à endiguer l'instabilité politique chronique du pays depuis le retrait américain, en décembre 2011. Pour l'historien Pierre-Jean Luizard du CNRS, « on est revenu à la case départ, l'Irak se retrouve prisonnier de groupes qui veulent en faire une terre brûlée, y propager le chaos ». Depuis six mois, la minorité sunnite, qui s'estime discriminée, proteste contre le gouvernement. Cette « radicalisation » du camp sunnite, dont témoigne le retour en force d'al Qaïda, pourrait réveiller les milices chiites. « Le déclenchement du soulèvement contre le régime Assad a été perçu par les sunnites irakiens comme le signal de la revanche, la preuve qu'ils peuvent échapper à leur statut de minorité marginalisée », explique Pierre-Jean Luizard. L'Irak est-il voué à replonger dans la guerre civile ? Avec la confessionnalisation rampante de la scène politique, il est à craindre le pire.