Il n'est pas encore 8h, et la niche à ordures de la cité des 600 logements à Baïnem est pleine à craquer, alors que le camion de Netcom est passé la nuit. C'est une autre rotation qui est effectuée le matin pour éviter les chats et chiens errants et surtout les odeurs nauséabondes. Saïd, éboueur, n'est pas content. « C'est du gâchis », peste-t-il. Et d'expliquer : « Les citoyens ne respectent pas les horaires de sortie des ordures. conséquence : nous devons faire plusieurs rotations. » Saïd et ses collègues sont excédés par cette situation. Ils en appellent au civisme des citoyens. Il dit ne constater aucune amélioration. Dans le métier depuis une trentaine d'années, sa famille est restée à M'sila. Personne ne sait la nature du travail qu'il effectue. « Dans ma famille, être éboueur est mal perçu », raconte-t-il. Dès son mariage, il fallait qu'il se prenne en charge financièrement. Avec tout juste un niveau scolaire primaire, sans aucune formation professionnelle, il débarque à Alger. Après quelques déboires, il est recruté enfin par Netcom. Intégré dans une équipe, Saïd fait le roulement. Soit à partir de 5 h du matin ou tard le soir jusqu'à 4 h du matin. Son travail est dangereux et pénible. Des gants de protection leur sont distribués, mais il dit ne pas les supporter. Plusieurs fois, il a été victime de petits incidents. Souvent, des bris de verre, l'aiguille d'une seringue ou des objets contondants qu'il ramasse à même le sol le blessent. Mais il doit tenir bon car à chaque fin de mois, il doit envoyer un mandat à sa famille. Les autres problèmes auxquels fait face Saïd et ses collègues sont les aléas de la météo. Qu'il pleuve, qu'il neige ou qu'il vente, il doit s'acquitter de sa tâche et même faire parfois l'agent de circulation quand il est gêné dans son travail de collecte. Avec le grade d'agent d'assainissement, Saïd ne se plaint point de sa mensualité, gonflée par les primes de rendement et de nuisance. Mais son expérience et sa constitution physique sont là pour compenser puisque la difficulté de son travail effectué debout sur le marchepied de la benne tasseuse durant toute la tournée ne lui permet plus d'être attentif comme avant. Souvent, il verse le contenu du bac par terre car le camion a déjà démarré faute de coordination entre les différentes étapes de la collecte. Les salissures sont son lot quotidien. Après chaque tournée, il doit laver ses vêtements de travail et ses chaussures. Eléments incontournables de l'assainissement de la commune, les éboueurs sont mal considérés. Et pourtant, ils méritent toute notre gratitude et notre respect. La plupart d'entre eux viennent de l'intérieur du pays pour effectuer ce travail ingrat. Laissant famille et enfants, ils font face à toutes sortes de quolibets et autres railleries de la part de citoyens inconscients de leur rôle prépondérant dans l'hygiène et l'assainissement de l'environnement.