Maître Farouk Ksentini, président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH), a approuvé les propos du garde des Sceaux et le félicite pour cette initiative. « Il était temps qu'on mette fin aux abus de la détention provisoire. Il y a des pays où la détention provisoire n'existe pas. En matière délictuelle, les gens ne vont en prison que lorsque leur culpabilité est définitivement reconnue », déclare-t-il en soulignant que la présomption d'innocence, qui est un principe constitutionnel, doit être respectée. Selon lui, cette disposition est utilisée de manière abusive. Ce qui explique son appel au respect du droit des justiciables. « Le juge doit être raisonnable dans son appréciation et stopper définitivement les fous de la détente », recommande-t-il. L'avocat Miloud Brahimi s'est montré plutôt sceptique quant à une éventuelle annulation de la détention provisoire. « Elle ne sera jamais annulée », affirme-t-il. Il admet, toutefois, que les juges prononcent les détentions provisoires avec une facilité incompatible avec les textes qui existent déjà. Selon ses dires, la loi, si elle est bien appliquée, est suffisante pour protéger les intérêts des justiciables et pour respecter la présomption d'innocence, étant donné qu'elle dit très clairement que la détention ne se justifie qu'exceptionnellement, par exemple dans le cas où le crime est très grave. « Malheureusement, nos magistrats instructeurs et le ministère public sont favorables à la détention systématique. Elle devient même une sorte de condamnation préventive », rappelle Me Miloud Brahimi qui salue malgré tout les efforts du ministre de la Justice. « C'est la première fois qu'un ministre prend un engagement public de cette nature, il faut l'encourager parce qu'il va dans la bonne direction. Mais je pense que ses propos ont été déformés car l'annulation ne peut pas exister puisque aucun pays au monde n'a aboli la détention préventive », précise-t-il. Maître Chorfi Cherif a fait part, lui aussi, de sa satisfaction, en affirmant qu'il ne peut qu'applaudir cette décision. Mais pour ce qui est de la faisabilité de cette mesure, il estime que cela est un autre débat qui sera assurément au centre de l'atelier national annoncé par le ministre de la Justice. « Je voudrais louer cette idée lancée, car dans bien des cas, cette mesure n'a pas de raison d'être. J'ose espérer que cela ne soit pas un effet d'annonce », dit-il, en rappelant que cette disposition est contraire à un principe constitutionnel qui dit clairement que « la liberté est la règle et la détention est l'exception ». A ses yeux, la déclaration du ministre de la Justice confirme une volonté politique. Tayeb Louh a indiqué que l'atelier national consacré à l'examen de l'amendement du code de procédure pénale examine la possibilité d'annuler la détention provisoire et de maintenir la présomption d'innocence. Pour le ministre, « il est préférable de ne pas maintenir la détention provisoire et de présenter l'affaire au juge d'instruction qui se prononce sur la détention ou la mise en liberté. »