Ils ont réussi à mettre hors d'état de nuire, lors d'une opération antiterroriste à Raoud plage, dans la banlieue de Tunis, l'auteur présumé de l'assassinat de l'opposant Chokri Bélaid. Il s'agit de Kamel Gadhgadhi, un commandant d'Ansar al-Charia, un groupe terroriste affilié à al Qaîda. L'attentat, qui a été perpétré il y a un an, jour pour jour, a bouleversé la Tunisie et plongé le pays dans la crise politique. « Gadhgadhi, qui était recherché pour l'assassinat de Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi, deux farouches critiques du parti Ennahdha, et de sept soldats, dont certains ont été égorgés au Mont Chaâmbi, en juillet dernier, figure parmi les morts. L'enquête et les analyses ont dévoilé son identité », déclare le ministre de l'Intérieur, Lofti Ben Djeddou, lors d'une conférence de presse. C'est le plus beau cadeau qu'on puisse faire aux Tunisiens un an après le meurtre de Belaïd » dit-il. Les unités spéciales de la Garde nationale, qui ont mené une opération qui a duré près de 20 heures, ont réussi à éliminer sept autres membres d'Ansar al-Charia « lourdement armés » et saisir « trois Kalachnikovs, des bombes artisanales, des ceintures explosives, des munitions et 600 kg d'explosifs TNT ». Cette action survient alors que plusieurs évènements sont prévus pour commémorer l'anniversaire de la mort de Chokri Belaïd. Notamment une veillée à la bougie sur l'avenue Habib-Bourguiba, une conférence de presse pour lever le voile sur les dernières évolutions de l'enquête, suivie par une marche et un rassemblement populaire au cimetière El Jallez ce samedi pour faire écho au 8 février 2013, jour de son enterrement. Et, entre les deux « moments », la célébration officielle prévue demain de l'adoption, le 26 janvier, de la nouvelle Constitution au terme de plusieurs mois de pénibles tractations. Plusieurs responsables étrangers, dont le Premier ministre Abdelmalek Sellal, représentant du président Bouteflika, sont attendus à cette cérémonie. Les familles des deux critiques d'Ennahdha crient au scandale. Pour elles, en annonçant la mort de Kamel Gadhgadhi, le ministère de l'Intérieur et Ennahdha visent une chose : refermer le dossier des assassinats politiques en Tunisie en les résumant à la seule personne de l'exécutant. Selon Adnene Brahmi, fils du défunt Brahmi, « Gadhgadhi n'est qu'un outil ». « La priorité, dit-il, est de découvrir les vrais commanditaires des deux assassinats et de dévoiler toute la vérité sur les deux affaires ». Hamma Hammami, le porte-parole du Front populaire, assure qu'Al Jabha continuera à organiser ses manifestations hebdomadaires devant le siège du ministère de l'Intérieur pour demander aux autorités de dévoiler les noms des personnes impliquées dans l'assassinat de Chokri Belaïd. Ben Djeddou s'en défend. « Les terroristes ont été appelés par haut-parleurs à se rendre, nous avons voulu éviter de les tuer, mais ils se sont obstinés », dit-il. Selon Mohamed Ali Aroui, porte-parole du ministère, « certains ont tenté de perpétrer des opérations suicides en activant les ceintures explosives en se rapprochant des unités sécuritaires ». Pour montrer que les services de sécurité tunisiens veillent au grain, Ben Jeddou donne quelques chiffres. « 1.343 accusés dans des crimes terroristes ont été traduits en justice en 2013 », dit-il avant de donner le nombre de personnes arrêtées pour leur implication dans des réseaux d'envoi de jeunes Tunisiens en Syrie : 293. « Plus de 8.000 filles et garçons ont été frappés d'une interdiction de voyager, à la demande de leurs familles », dit-il.