Le Pakistan renoue avec la violence. Au moins onze personnes ont été tuées et une vingtaine d'autres blessées dans un double attentat suicide perpétré, hier, contre un tribunal d'Islamabad. Le bilan fait état de 11 morts, dont le juge Rafaqat Awan, et 24 blessés. A noter que ce juge avait déjà rejeté en première instance une demande afin d'entamer des procédures contre l'ex-président Pervez Musharraf pour l'opération sanglante de l'armée en 2007 contre des islamistes réfugiés dans la mosquée Rouge d'Islamabad. Un autre tribunal avait, par la suite, donné le feu vert à des poursuites contre l'ex-homme fort du pays dans cette affaire. Si le lien n'est pas établi, cette attaque intervient deux jours après l'annonce d'un cessez-le-feu d'un mois par le Tehreek-e-Taliban Pakistan (TTP), regroupement de factions islamistes armées créé en 2007, afin de relancer les pourparlers de paix avec le gouvernement. « Nous n'avons aucun lien avec cette attaque. Nous soutenons fermement le cessez-le-feu. Et nos camarades dans le mouvement ne peuvent pas violer cet accord », a déclaré le porte-parole du TTP, Shahidullah Shahid. La piste de la dissidence islamiste, clairement exprimée par la dénonciation par le commandement des attaques revendiquées par des factions, est sérieusement envisagée. « Cette attaque montre qu'il y a au Pakistan une multitude de groupes armés, et que ces insurgés prolifèrent jusque dans la capitale », a commenté le général à la retraite, Talat Masood. Fait rare : la capitale est généralement épargnée par le cycle des attentas sanglants. Il s'agit, depuis près de 3 ans, de la première attaque. Le dernier attentat suicide dans la capitale remonte à juin 2011, peu après le raid d'un commando américain contre Oussama Ben Laden à Abbottabad, ville-garnison située à une centaine de kilomètres au nord. Ce sont surtout la région du Baloutchistan (sud-ouest) et la métropole économique, Karachi, qui sont régulièrement visées. Mais le Pakistan, qui replonge dans la violence, a raté une chance de dialogue de paix amorcé au début de février et consolidé par l'offre de cessez-le-feu proposée par le TTP. Pour les analystes, il est clair que la trêve d'un mois des Talibans s'explique par le choix tactique de préparer leurs troupes, affaiblies par les raids aériens, à l'offensive de l'armée dans le fief du Waziristân (nord), frontalière avec l'Afghanistan.