Sans aucune mission ou occupation en vue, après son retrait fin 2014 de l'Afghanistan, l'Otan renoue avec l'espace euro-atlantique. Selon le général américain Philip Breedlove, commandant suprême des Forces alliées en Europe (Saceur), l'Alliance, qui a envoyé mi-avril des avions Awacs survoler les pays baltes et des navires dans la mer Baltique et en Méditerranée orientale, est appelée à revoir toute sa stratégie. « Nous suivons de près l'évolution des événements dramatiques qui se déroulent à l'est de l'Ukraine et nous restons particulièrement inquiets pour les habitants. Je pense que nous devrions y réfléchir à une présence militaire permanente dans les pays membres en Europe de l'Est, jusqu'aux frontières de la Russie », dit-il. Selon certains experts, les Etats-Unis pensent revoir leur position sur les armes nucléaires tactiques déployées en Allemagne, aux Pays-Bas, en Belgique, en Italie, en Turquie... et déployer en Europe de l'Est entre 10.000 et 20.000 hommes. Dans le viseur de l'Alliance : la Russie ; même si le général américain est convaincu que le président Poutine n'enverra pas ses forces armées dans l'est de l'Ukraine. « Il pourrait atteindre ses objectifs par d'autres moyens », explique-t-il, estimant, lors d'une conférence qu'il a animée, mardi dernier, à Ottawa (Canada), que l'Otan a besoin d'évaluer sa « réactivité » face à la Russie, qui depuis l'annexion de la Crimée, a « modifié la dynamique » du partenariat instauré depuis l'effondrement du bloc de l'Est et la chute du mur de Berlin en 1989. En attendant ce redéploiement, Anders Fogh Rasmussen s'engage à soutenir ses alliés européens. Pas seulement ceux qui sont sur le long de la frontière russe mais aussi la Moldavie, la Géorgie, la Bulgarie et ceux qui ont fait appel du pied à l'Alliance, comme la Bosnie, le Monténégro, la Macédoine. « Nous prenons des mesures légitimes pour renforcer notre soutien aux Alliés, depuis la mer Baltique jusqu'à la mer Noire », soutient-il. En 2008, lors de la guerre de cinq jours entre la Russie et la Géorgie, le président George W. Bush fut contraint de renoncer à des projets prévoyant l'admission de la Géorgie à l'Otan. La France et l'Allemagne, qui étaient réticentes, ont craint une escalade du conflit et la transformation de ce dernier en guerre ouverte avec la Russie. Six ans plus tard, les données sont favorables aux « attentes » de l'Otan. L'Union européenne tient un discours viscéralement antirusse. Même des pays réputés pour leur neutralité officielle, comme la Finlande et la Suède, songent depuis la crise ukrainienne à « recentrer leur doctrine » pour adhérer à l'Otan. Face à cet encerclement annoncé, Moscou prend les devants. Tout en expliquant à ses « voisins » que l'accueil d'installation de l'Otan sur leurs territoires les place automatiquement sous le coup d'une menace, elle annone à qui veut l'entendre que les faits et gestes actuels de l'Otan à ses frontières sont « un déclenchement d'une nouvelle guerre froide ». « Nous ferons tout pour que toute tentative de renforcer la présence de l'Otan près des frontières de Russie reçoive une riposte adéquate. Nous avons des dispositifs modernes et des capacités pour résoudre ce problème de manière adéquate », déclare Franz Klintsevitch, le vice-président du Comité de la Douma pour la Défense. « Si l'Alliance souhaite revenir à sa vocation de guerre froide, ce n'est pas notre choix », répliquent les Russes mettant en garde leurs voisins européens sur la montée de l'idéologie fasciste et le risque de les voir transformés en « usines à guerre » et la manipulation des chiffres. En 2012, les 27 pays européens de l'Otan ont dépensé 319 milliards de dollars pour leurs forces armées contre 91 milliards pour la Russie.