Dans la vallée de l'Euphrate, entre Deïr ez-Zor (Syrie) et Fallouja (Irak), l'utopie d'un Etat islamique prend forme grâce au financement des combattants et leur approvisionnement en armes par certains pays. Plus au Nord, les Kurdes manœuvrent pour tirer profit du chaos actuel et asseoir davantage leur « autonomie ». « Si nécessaire, nous ramènerons toutes nos forces pour préserver Kirkouk », déclare Massoud Barzani, le président du Kurdistan irakien, ne cachant pas sa fierté de voir ses forces contrôler, depuis le 12 juin dernier, la ville multiconfessionnelle riche en pétrole. « Il y avait des forces irakiennes dans ces zones, puis il y a eu un vide sécuritaire, et les Peshmergas (les forces kurdes, ndlr) sont venus combler ce vide », dit-il. Et d'ajouter : « Nous avons laissé dix ans au gouvernement fédéral pour résoudre les problèmes de ces zones. Maintenant, c'est fini », avertit-il. La prochaine étape sera l'exportation du pétrole. Selon Reuters, outre la Turquie, la première livraison du pétrole kurde est arrivée au port d'Ashkelon, dans le sud d'Israël. Curieusement, les responsables israéliens font savoir publiquement aux Etats-Unis, depuis quelques jours, que l'indépendance du Kurdistan est « inévitable ». « Israël, disent-ils, reconnaîtra cet Etat dès que les Kurdes le demanderont à la communauté internationale. » Bagdad, qui n'a pas oublié que la Constitution irakienne a prévu un référendum sur le statut de Kirkouk, commence à percevoir le danger. Elle manœuvre à son tour en demandant l'aide à tout le monde. Mais en vain. Les Etats-Unis annoncent un plan de 500 millions de dollars pour armer et entraîner des rebelles modérés en Syrie voisine afin qu'ils participent à la lutte en Irak contre l'EIIL et l'envoi, en contrepartie de la formation d'un gouvernement d'unité nationale d'ici à le 1er juillet, de 300 conseillers militaires pour « entraîner, assister et soutenir » les forces irakiennes face aux djihadistes. La Russie, qui estime que la dislocation de l'Irak déstabiliserait le Proche-Orient et l'Afrique du Nord pour des années, laisse entendre qu'elle ne restera pas les bras croisés face à l'offensive fulgurante de l'EIIL et aux tentatives des différents groupes djihadistes de propager le terrorisme dans les pays de la région. Que fera-t-elle ? Elle ne le dit pas. Du moins pour l'heure. Quasiment seul, le Premier ministre Nouri al-Maliki tente de sauver la situation. Il a ordonné, hier, à l'armée de reprendre Tikrit, prise le 11 juin dernier par l'EIIL.