« L'édification d'un Etat de droit est tributaire d'un pouvoir judiciaire et d'une justice forte et performante. C'est l'objectif de la réforme engagée dans le système qui repose essentiellement sur la modernisation de la justice. Ce qui implique une vision claire et des démarches courageuses ». C'est par ces propos que le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Tayeb Louh, a résumé, lors d'une conférence de presse animée, hier, au siège de Cour d'Alger, en présence du ministre de la Communication, Hamid Grine, la stratégie adoptée par son ministère. Diverses dispositions ont été prises, dont plusieurs nouveautés. Le ministre a fait état, en matière de justice pénale, de nouvelles procédures visant à alléger la surcharge des tribunaux. Il s'agit de mettre en place de nouvelles procédures susceptibles de garantir la protection des témoins dénonciateurs dans les affaires de crimes organisés et de corruption. Le ministre a insisté sur la nécessité de rendre la riposte pénale plus dissuasive tout en garantissant la présomption d'innocence et les droits de la défense. Pour le ministre, il faut réduire la durée de la détention préventive, allusion faite à l'affaire Abdelmoumen Khalifa qui suscite encore des interrogations. Autre disposition annoncée par le ministre : la réforme profonde du parquet. Ce qui lui permettra de contribuer à l'élaboration d'une politique pénale nationale dans le strict respect de la loi et de la procédure garantissant l'exercice de libertés individuelles et collectives. Idem pour les droits fondamentaux du citoyen, à travers le renforcement des pouvoirs hiérarchiques de l'autorité judiciaire sur la police judiciaire. Le ministère a d'ailleurs prévu la mise en place de moyens modernes au profit du parquet. Ceci lui permettra d'assumer ses missions dans l'action publique et dans le déclenchement et la conduite de l'enquête préliminaire. La même procédure sera adoptée en cas de violation du respect de la propriété intellectuelle. La nouvelle disposition consiste en l'introduction de règles juridictionnelle dans la législation nationale. Il s'agit, selon le premier responsable du secteur, d'assurer la protection des intérêts des nationaux et des ressortissants algériens victimes d'infractions commises à l'étranger. 257.000 affaires en suspens à la Cour suprême Le volume des affaires en attente au niveau de la Cour suprême est, selon Louh, un problème préoccupant auquel il faut trouver des solutions dans les plus brefs délais. Pour l'heure, il y a plus de 257.000 dossiers en attente. La réflexion est engagée pour trouver des solutions novatrices à ce problème auquel est confrontée la Cour suprême devenue par la force des choses un troisième degré de juridiction. Pour le ministre, il ne s'agit nullement d'augmenter le nombre de juges pour le traitement de ces affaires. L'idéal serait de ne soumettre à cette instance que les affaires de grande importance qui relèvent de ses prérogatives. La réflexion portera également sur la possibilité de soulever, à l'occasion d'un pourvoi en cassation, des questions liées à la constitutionnalité des lois. Selon Louh, la réalisation des objectifs assignés nécessite la valorisation des ressources humaines, la modernisation du système et l'amélioration des modes de gestion et d'organisation. La formation du magistrat est pour le moment l'une des priorités du programme de modernisation. « Le juge doit être suffisamment armé pour répondre aux exigences de la conjoncture actuelle où la coopération judiciaire internationale devient incontournable », a-t-il souligné, rappelant que la commission de la réforme judiciaire présentera ses résultats le 15 octobre prochain. Un milliard de dinars pour le fonds de pension alimentaire Pour Louh, l'adoption le 26 août dernier par le Conseil des ministres des quatre avant-projets de loi ne font que renforcer la réforme engagée dans le secteur. Aussi, la loi de finances pour 2015 consacrera, dans un premier temps, un milliard de dinars pour le fonds de la pension alimentaire destiné aux femmes divorcées et exerçant le droit de garde des enfants en général qui sont confrontées à des problèmes en matière de recouvrement de la pension alimentaire, en raison du refus ou de l'impossibilité pour le père d'en assurer le versement. Quant au projet relatif à la protection de l'enfant, le ministre rappelle qu'il comprend de nouveaux principes consacrés pour la première fois dans la législation nationale notamment la représentation obligatoire de l'enfant par un avocat lors de la garde vue, la proposition de mécanismes de médiation comme mode alternatif, la poursuite pour l'enfant délinquant et l'audition filmée des enfants victimes des agressions sexuelles. Le projet de loi prévoit également des mesures protectrices pour les enfants en danger moral. Pour la première fois, la protection judiciaire se manifeste par la consécration du principe d'irresponsabilité pénale des enfants dont l'âge est inférieur à 10 ans conformément aux dispositions introduites dans le code pénal. Le ministre a insisté sur la proposition de mécanismes de médiation entre l'enfant délinquant et la victime d'un délit ou d'une contravention, qui ont essentiellement pour but d'instaurer de nouveaux modes alternatifs à la poursuite pénale. Violence faite aux femmes : combler le vide juridique Plusieurs dispositions viennent enrichir le cadre juridique régissant la protection de la femme. Il est proposé, selon le ministre, de nouvelles dispositions prévoyant une protection spécifique contre les violences volontaires occasionnant des blessures. Cependant, dans le souci de préserver la vie conjugale, il est prévu que le pardon de la victime a pour conséquence de mettre fin aux poursuites pénales lorsque les faits ont un caractère délictuel. Un nouvel article (333 bis 1) est prévu pour criminaliser les agissements que subissent les femmes dans les lieux publics. Le plus souvent sous forme de violences verbales ou d'actes portant atteinte à leur pudeur. La peine prévue pour cette infraction est aggravée lorsque la victime est une mineure de 16 ans. Safia D. Mort d'Albert Ebossé : « Les responsables seront sanctionnés » Le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Tayeb Louh, a déploré, hier, les actes de violence et de vandalisme dans nos stades. Pour le ministre, la mort du joueur de la JSK, Albert Ebossé, a non seulement mis en émoi la société algérienne mais a également porté préjudice à la réputation de l'Algérie. « Le ministère de la Justice a donné de fermes instructions pour la poursuite de l'enquête préliminaire afin de situer les responsabilités et d'arrêter l'auteur de cet acte odieux », a prévenu le ministre. « La responsabilité n'incombe pas seulement à celui qui a visé Albert Ebossé. Tous ceux qui de par leur position ont une responsabilité dans ce crime seront sévèrement sanctionnés », a indiqué le ministre, soulignant que l'enquête prendra le temps qu'il faudra. S. D. Inauguration du premier centre de la carte à puce Le système judiciaire sera prochainement doté du premier centre de personnalisation de la carte à puce pour la signature électronique. L'inauguration aura lieu dans 10 jours. Le ministre de la Justice l'a annoncé, hier, lors d'une conférence de presse. Au sujet de la réforme du tribunal criminel, Tayeb Louh a souligné que ce volet ne constitue guère une urgence. La réflexion est en cours, impliquant juristes et experts en la matière. S. D. Pour la spécialisation de la presse dans le domaine de la justice Le ministre de la Justice a plaidé, hier, pour la spécialisation des journalistes, désireux de le faire, dans le domaine de la justice. Un tel choix profitera aussi bien à la justice qu'aux lecteurs. Le ministère de la Justice et celui de la Communication ont conclu un accord pour la formation de journalistes dans ce domaine. Selon Louh, son département a ses spécificités, d'où la nécessité de maîtriser les concepts et la terminologie permettant aux journalistes de sensibiliser l'opinion publique. S. D. Améliorer le fonctionnement des juridictions Le projet de loi relatif à la modernisation de la justice vise l'amélioration du fonctionnement des juridictions à même de rendre la justice plus accessible aux justiciables. Le projet comprend 19 articles répartis en cinq chapitres. Le premier définit l'objet de loi et son champ d'application. Le second prévoit la mise en place du système informatique centralisé du ministère de la Justice et traite la certification électronique alors que les autres chapitres portent sur la communication des actes judiciaires et autres documents ainsi que les notifications par voie électronique.