Le jour de l'an amazigh (Yennayer), célébré à travers tout le territoire national, reste un « repère identitaire et historique » qui retrace les tréfonds d'une civilisation millénaire et d'un patrimoine riche, a indiqué, dimanche dernier à Tizi Ouzou, le directeur local de la culture, lors d'un colloque sur « La littérature de l'oralité et le conte populaire : de la transmission culturelle à la construction identitaire ». « Au-delà de sa symbolique fortement ancrée dans les pratiques et les coutumes, ce jour de l'an amazigh, célébré à travers tout le territoire national, reste un repère identitaire et historique qui retrace les tréfonds d'une civilisation millénaire et d'un patrimoine riche », a affirmé M. Ould Ali El Hadi à l'ouverture du colloque organisé à la maison de la culture Mouloud-Mammeri dans le cadre de la 8e édition du salon Djurdjura du Couscous qui coïncide avec la célébration de Yennayer. Yennayer, selon lui, est aussi un « marqueur indélébile du destin d'une communauté humaine » qui, malgré les travers que l'Histoire lui a infligé, « a su résister à l'effacement, à la dislocation et à l'oubli ». M. Ould Ali El Hadi a rappelé les valeurs véhiculées par Yennayer telles que la communion et la fraternité. Un jour célébré dans le faste et la joie pour présager une nouvelle année de bonheur et de bon augure vivrière. « Yennayer est vécu comme un retour à la terre nourricière, à la nature couveuse et à l'environnement protecteur qu'il convient de respecter et de préserver. L'officialisation de tamazight, a-t-il dit dans ce contexte, constituera « un rempart contre l'érosion de la culture algérienne », soulignant qu' « un statut officiel de la langue amazighe sera le rempart contre l'érosion de notre culture ». Le directeur local de la culture a estimé, à ce propos, qu' « il appartient à la société civile et politique de prendre à bras-le-corps cette revendication d'officialisation de la langue amazighe et de la concrétiser, puisque c'est du devenir d'un peuple dont il s'agit ». Toujours vivace au M'zab Loin d'être un rituel évanescent de notre histoire, Yennayer est une fête toujours vivace dans le M'zab, avec ses pratiques rituelles, ses couleurs et ses traditions culinaires. Célébré la nuit du 6 au 7 janvier dans le M'zab, le nouvel an amazigh obéit à une tradition liée aux activités agricoles et aux ressources essentielles à la vie paysanne. Il marque le début de la saison hivernale et l'année agraire dans cette région au climat aride. Pour les habitants des oasis du M'zab, Yennayer, qui coïncide avec la fin de la cueillette des dattes, constitue une étape cruciale pour passer en revue la situation environnementale des palmeraies et annoncer le début de l'opération de soins et de toilettage des palmiers dattiers productifs, a indiqué à l'APS Ami Hadj Omar, propriétaire d'une palmeraie à Ghardaïa. Le but de cette opération est de débiter à la scie ou à la hache les palmes sèches, les rémanents et autres arbustes morts, la pousse des rejets, le lif et les restes des hampes florales, afin de permettre au sol de conserver l'humidité et les éléments nutritifs et de réduire les risques d'incendie, a-t-il expliqué. L'opération de toilettage touche, également, les seguias et autres réseaux de partage des eaux d'irrigation des palmeraies, a précisé ce connaisseur des travaux saisonniers agricoles. Dr Ahmed Nouh, notable de Béni-Isguen, a souligné, de son côté, que cette journée du nouvel an amazigh, qui présage d'une nouvelle année féconde, constitue, également, pour la gent féminine, une occasion pour discuter sur la situation de la femme, notamment les nouvelles mariées. « Chaque famille offre un plat de « R'fis » à la nouvelle mariée et les femmes se conseillent sur la vie du couple et des enfants et s'enquièrent de la situation des veuves et des divorcées, dans un climat de solidarité », a-t-il fait savoir. Ces rituels, qui tirent leur origine de l'attachement des habitants du M'zab à leur culture ancestrale et consolident la cohésion sociale et la solidarité, varient entre le désir de s'attirer la bénédiction et s'assurer une année faste mais aussi d'éloigner le mauvais sort, dit-on. Chaque année, Yennayer est célébré avec ferveur, le même recueillement et tout le cérémonial habituel autour de plats spéciaux minutieusement préparés pour la soirée du nouvel an amazigh et qui ne doivent contenir que des ingrédients de couleur blanche (sucre, semoule, lait...) afin que la nouvelle année soit une année de paix et de bonheur, explique-t-on. « R'fis », un plat du terroir, incontournable lors de la célébration du nouvel an amazigh, se prépare essentiellement à base de semoule, sucre, lait et œufs, que la ménagère fait cuire sous forme de galette, puis effritée et passée à la vapeur, imbibée de Smen et décorée avec du raisin sec et des œufs durs. Sa dégustation, après l'incontournable thé à la menthe, est suivie d'une prière et de la Fatiha du Saint Coran, pour implorer Dieu de faire de cette nouvelle année, considérée comme le début de la saison agricole, une année faste pour l'agriculture et l'hydraulique. Au nord de la vallée du M'Zab, un autre plat culinaire traditionnel dénommée « Charchem » est préparé à l'occasion de Yennayer. Il est composé essentiellement de blé fumé avec des ingrédients et des épices qui lui donnent une saveur spécifique. La soirée de Yennayer s'achève, en famille, dans une atmosphère rituelle marquée par des jeux appelés Aliouène, genre de Bouqala algéroise. Ce jour-là, il faut se montrer jovial, aimable et généreux, selon la tradition.