Le film documentaire de Nazim Souissi « Merci pour la civilisation », projeté samedi dernier au soir à Batna, a permis au public, notamment aux jeunes, de découvrir le caractère destructeur de la colonisation française en Algérie, présentée alors comme une « expédition civilisatrice ». Au cours du débat qui a suivi la projection au centre de recherche scientifique de l'université de Batna, le réalisateur, Nazim Souissi, a estimé que « Merci pour la civilisation » est un éclairage destiné à « raviver la mémoire sur les premières années de la présence française en Algérie, entre 1830 et 1834 ». Une période pas assez connue, parfois occultée par certains historiens français « intéressés » en raison des exactions, souvent atroces, commises par les « civilisateurs » et que Souissi a voulu rappeler au jeune public algérien. Au cours de l'animation de ce débat, organisé dans le cadre du Forum culturel auressien (FCA) sur une initiative de l'association des Amis d'Imedghassen et de l'université de Batna, le réalisateur s'est réjoui du fait que la réaction du parterre d'universitaires, de chercheurs en histoire, d'intellectuels et d'étudiants, l'objectif ait été « largement atteint ». Pour Nazim Souissi, « beaucoup ont découvert, pour la première fois, des faits et des détails qui donnent un éclairage nouveau à cette période précise qui a bouleversé le destin de tout un peuple ». Ce film documentaire de 69 mn est construit en une succession de séquences indépendantes les unes des autres, mais constituant chacune un exemple édifiant montrant plusieurs visages du fait prétendu civilisateur de la France. Il s'agit, a ajouté le réalisateur du documentaire, de « multiplier les passerelles entre le passé et le présent, d'éclairer certaines zones d'ombre et de rompre avec la vision coloniale en synthétisant les résultats de quelques recherches entreprises autour de la question de la colonisation de l'Algérie ». En portant un intérêt marqué à certains aspects « sous-analysés » du fait colonial, l'auteur et la coscénariste, Zineb Merzoug, refusent manifestement de cautionner l'occultation du caractère particulièrement sauvage du colonisateur durant les toutes premières années de la conquête française commandée par le général de Bourmont. Plusieurs étudiants approchés par l'APS à l'issue du débat ont estimé que le film de Souissi exhume une histoire vieille de plus de 180 ans et ne peut que contribuer à l'écriture de l'histoire de l'Algérie à laquelle le ministre des Moudjahidine ne cesse d'appeler. Nazim Souissi a rappelé, dans ce contexte, la volonté de la France coloniale de s'approprier l'histoire de l'Algérie en s'emparant des archives de cette période de l'occupation du pays. Une période de souffrances, de larmes et de sang qui constitue un pan important de l'histoire de la colonisation que certains veulent dissimuler dans une tentative de brouiller les repères de l'identité algérienne. « On continue, de nos jours, à tuer des gens et à tenter d'étouffer l'histoire de grandes civilisations tout en développant des discours pour se dédouaner en ‘'dépravant'' l'histoire et en prétendant vouloir ‘'aider les gens'' », a souligné le réalisateur de « Merci pour la civilisation ». Un hommage posthume a été rendu, à cette occasion, au cinéaste anti-colonialiste français, René Vautier, décédé le 3 janvier dernier à l'âge de 86 ans. et à Nardjess, interprète de la chanson hawzi.