Avant-hier la présentation du projet de relance du cinéma en Algérie présenté à l'Assemblée nationale par la ministre de la Culture Khalida Toumi, a fait mouche alors que l'atmosphère parlementaire n'était pas encore chauffée à blanc. La riposte, frontale et un tant soit peu franche du collier de la part des députés du RCD, un parti dont Mme Toumi connait les mœurs et les catégories de pensées par cœur, ne devait surprendre personne. En tout cas pas elle qui devait sûrement s'attendre à ce que son intervention ne passât pas inaperçue notamment après l'éclatant succès remporté par le SILA, effaçant d'un revers de main la levée de boucliers des détracteurs qui se sont dépensés sans compter durant l'été, pour ramener les exposants égyptiens en Algérie. Mais Madame Toumi n'est pas naïve au point de croire que ses anciens camarades du RCD étaient enfin venus à résipiscence pour clore le chapitre du départ de leur militante vers des cieux plus cléments et aient décidé soudain de rompre le silence caractérisant leurs relations avec elles, pour l'applaudir et, partant, l'encourager à transformer la léthargie du cinéma actuel en nouvelle dynamique de performance. Relayés par certains organes de presse, les propos de certains députés ont été amplifiés à un point tel qu'un journaliste avait cru en tirer quelque gloire en citant le député Aït –Hamouda qui, la veille dans les travées de l'assemblée nationale, s'était semble-t-il référé au chef de la Propagande nazie en 1940, le Docteur Goebbels, pour déclarer à propos du projet de cinéma de Khalida Toumi qu'il était destiné à «criminaliser la culture». Ce n'est un secret pour personne de savoir que les députés du RCD, que ce soit dans les harangues improvisées, dans leurs écrits ou dans les débats Urbi et Orbi, manient avec subtilité l'art du discours. Mais dans le cas présent hélas il semble que la hâte ait été le principal souci qui, pour motiver leurs critiques sur le projet du ministère de la Culture, auraient dû chercher une référence moins contestatble. Et savoir que s'ils s'étaient donnés un peu plus de peine, ils auraient trouvé des référents plus convaincants pour justifier leur argumentaire. Un exemple ou deux suffiraient éventuellement à faire la part des choses. Un peu de mémoire et l'on comprendra le reste. En effet, qui eût soupçonné que les Etats-Unis, pays de la « liberté » de surcroît, sortant de la seconde guerre mondiale, aient pu pratiquer la censure sur le cinéma et, pour mieux faire comprendre leur initiative, désignèrent, après 1945, un coordinateur chargé de censurer tous les projets cinématographiques en cours d'élaboration, contredisant du coup et leur pragmatisme et l'un des fondements du principe de leur libre entreprise ? Les Etats-Unis l'ont pourtant fait, qui plus est, ouvertement. Et dans la nomenclature des projets de tournage, des centaines de films ne virent pas le jour pour des raisons qui passeraient aujourd'hui pour banales. Parmi celles-ci l'interdiction de dénoncer l'acharnement avec lequel l'aviation américaine avait systématiquement bombardé des régions pacifiques en Europe et ailleurs dans le seul souci de booster le «courage» de leurs soldats. La censure américaine s'est également intéressé de près aux séquences rapportant la lâcheté des fameuses marines sur le terrain de combat. Ce système a fonctionné des années durant en Amérique. Je ne citerai pas le cas du glacis soviétique où le cinéma était surveillé de si près par le pouvoir au point que Staline s'y s'était prêté, non sans délectation. Quant à la France, au-delà de la liste des exclusions élaborées par les gaullistes et les communistes pour purger la culture et, par conséquent aussi le cinéma en se séparant de ses anciens collabos, la censure cinématographique est restée en vigueur pendant plus de 30 ans dans l'hexagone. Pour tourner un film il était exigé du producteur qu'il obtienne l'autorisation numérotée de la censure cinématographique, sans quoi, toute démarche en ce sens était inutile. Le débat, aujourd'hui, à l'assemblée nationale ne se justifie que par un seul impératif, à savoir : comment relever le cinéma national qui traîne en deçà du niveau des pâquerettes depuis au moins le début du terrorisme islamiste ? Comment relancer la production dans le 7e art ? C'est en fait la seule question dont on devrait se soucier pour éviter de sombrer dans le byzantinisme qui, malheureusement, a souvent caractérisé les débats de nos députés.