Photo : Makine F. Le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme (CNCPPDH) affiche toujours un optimisme sans faille en ce qui concerne la situation des droits de l'homme en Algérie. Le rapport annuel qu'il doit soumettre incessamment au président de la République souligne les progrès enregistrés en ce sens, mais ne passe pas à coté de certaines insuffisances toujours de mise, en termes de droits sociaux, à leur tête le logement qui est « absolu et incontestable », selon maître Farouk Ksentini. Lors de son passage ce jeudi au forum du journal El Moudjahid, Me Ksentini n'y va pas avec le dos de la cuillère pour affirmer que la corruption dénoncée en premier lieu par le Chef de l'Etat s'est malheureusement infiltrée dans le domaine de l'immobilier. Ce qui empêche les franges démunies de bénéficier d'un toit décent. En somme, affirme-t-il, les droits de l'homme en Algérie se sont améliorés, même s'il y a toujours des insatisfaits. D'après lui, ces avancées sont « vérifiables », dans la mesure où la paix civile est revenue et les libertés individuelles sont protégées. « Je continue à encourager l'Etat à bien faire en apportant des appréciations équilibrées, plutôt que de le décourager en soulignant uniquement les insuffisances », observe-t-il. La dernière preuve, indique-t-il, concerne le procès du naufrage du Béchar, ayant démontré « que la justice algérienne a agi librement sans la moindre restriction ». «L'ALGERIE N'EST PAS UN ETAT MAFIEUX» Concernant les ONG internationales et la décision du Premier ministre qui vient de donner son accord pour leur permettre de venir en Algérie afin d'établir des rapports sur diverses questions, le conférencier estime que la décision algérienne constitue « une réponse adéquate aux parties qui essayent de faire croire que l'Algérie est un Etat mafieux ». Maître Ksentini fait savoir à cet effet, qu'une rapporteuse sud-africaine des Nations unies est venue dernièrement établir un rapport sur le phénomène de la violence contre les femmes. Elle a relevé que l'Algérie a mis en place effectivement des dispositions pour combattre ce fléau et elle est repartie avec beaucoup de convictions, dira-t-il, en informant dans ce sillage que d'autres rapporteurs sont attendus au courant de ce mois en vue d'enquêter sur l'état de la liberté de la presse en Algérie. A ce propos, le président de la CNCPPDH a certifié que la liberté de la presse en Algérie gagne du terrain. Certes, reconnaît-il, « elle n'est pas totale, mais n'empêche sur le plan des idées, la presse algérienne a le droit de tout dire ». Me Farouk Ksentini lie cela aux progrès substantiels en termes des droits de l'homme, avant de souligner qu'il est temps d'opter pour l'ouverture des médias lourds au privé et à la pluralité avec des cahiers de charges stricts, de façon à ce que toutes les sensibilités soient représentées pour renforcer la démocratie. Abordant par ailleurs le volet de la réconciliation nationale, Me Ksentini réaffirme que ce projet initié et surveillé par le premier magistrat du pays constitue « une réussite à 95% ». « Cette opération extrêmement lourde a été réalisée par le président de la République sans l'intervention d'un tiers ou d'une aide étrangère. Il s'agit d'une affaire exclusivement algéro-algérienne». Me KSENTINI CONTRE LE JUGEMENT DES NON-JEÛNEURS Interrogé sur sa position concernant le jugement des non-jeûneurs, Maître Ksentini affirme qu'il y est catégoriquement. « Je déplore ce fait de toute mes forces, étant donné que la Constitution accorde la liberté de la religion », déclare-t-il en incombant cela à la mauvaise gestion de cette affaire par certains magistrats. D'après lui, il faut opter pour un travail pédagogique plutôt que répressif. Cela dit, « il ne faut pas laisser les choses dans le flou, à moins d'élaborer un texte en ce sens. Ce qui n'existe pas pour l'heure », relève-t-il. «LE MAROC EST UN ETAT BELLIQUEUX» Interrogé sur les agressions marocaines contre les Sahraouis, Me Farouk Ksentini rappelle que la position algérienne est connue en ce sens. Il préfère évoquer dans ce cadre le problème de la drogue qui se propage davantage en Algérie, ayant pour seule provenance : le Maroc. Ceci constitue, pour lui, « une arme de destruction massive contre l'Algérie ». Ce qui nécessite, dira-t-il, la mise en place de dispositions politiques pour arrêter ce phénomène qui non seulement détruit la santé de nos jeunes mais remplit nos prison. « Le voisinage du Maroc est extrêmement difficile à gérer. C'est un pays belliqueux et agressif », lance-t-il. KIDNAPPINGS : LA MOBILISATION, SEULE PARADE Interpellé sur la question de réarmer les citoyens pour lutter contre le terrorisme, Me Ksentini estime que le ministre de l'Intérieur est plus habilité à se prononcer. Pour ma part, dira-t-il, « si l'Etat a décidé de réarmer le citoyen c'est qu'il lui fait confiance ». A propos du phénomène du banditisme et des kidnappings devenus récurrents en Kabylie, il affirme que «l'Etat n'a jamais abandonné la lutte contre le terrorisme et la lutte contre ces fléaux doit se faire avec l'adhésion et le concours de la population locale». Pourquoi maintenir l'état d'urgence ? Me Ksentini souligne que son influence est quasiment nulle, puisque les dispositions du décret de 92 sont inemployées. Cependant, le problème de l'insécurité est toujours de mise, ce qui justifie le maintien de l'état d'urgence. LES DISPOSITIONS DE LA CHARTE POUR LA PAIX, TOUJOURS EFFECTIVES Maître Merouane Azzi, président de la cellule judiciaire chargée de la mise en œuvre de la charte pour la paix et la réconciliation, estime, pour sa part, que les droits de l'homme ne sont pas seulement politiques. Pour ce qui est de la charte pour la paix dont les dispositions sont toujours effectives, Maître Azzi annonce que le problème des mandats d'arrêt prononcés contre certains terroristes a été définitivement réglé et ces derniers ont été convoqués pour leur fournir le document de la main levée. Au sujet des 120 dossiers toujours en souffrance concernant des cas complexes de repentis, Me Azzi fait savoir que 30 dossiers ont été étudiés et ils ont bénéficié des dispositions de la charte pour la paix et la réconciliation. Le reste des dossiers est en train d'être traité au niveau de sept juridictions à l'échelle nationale.