Plus de 13 ans après l'invasion de l'Irak, le spectre d'un pays divisé et livré la barbarie de Daech prenant le relais d'une occupation désastreuse, hante la campagne irakienne de la présidentielle de 2006 dédiée aux errements de Bush stigmatisés par les démocrates et l'inefficience de la nouvelle stratégie de désengagement dénoncée par les républicains. Les revers militaires se suivent et soulèvent des questions sur la pertinence de la coalition menant sans succès notable depuis, août 2014, plus de 3 000 raids. Dans ce contexte, la bombe lâchée par le chef du Pentagone traduit le malaise vécu par la progression fulgurante de Daech maître de Ramadi et de Palmyre et des postes d'Al Walid et d'Al Tanaf, en Irak et en Syrie, assurant le contrôle de la frontière. Une victime expiatoire : l'armée irakienne régulièrement mise en déroute à Mossoul et à Ramadi. Interrogé sur CNN, le secrétaire d'Etat à la Défense, Ashton Carter, a sonné la charge contre les « soldats (qui) n'ont tout bonnement montré aucune volonté de combattre », tout en étant « plus nombreux que leurs adversaires ». Tout en appelant à l'union sacrée des Irakiens et à une contribution des tribus sunnites, il a souligné que « si nous leur fournissons un entraînement, des équipements et de l'aide, j'espère qu'ils se mettront à vouloir se battre parce que c'est seulement s'ils combattent que Daech peut être vaincu ». C'est « très surpris » que le Premier ministre irakien Haider al-Abadi a réagi aux déclarations du secrétaire américain à la Défense accusé à son tour de recevoir des « informations inexactes ». Mais, la riposte du général iranien Ghassem Souleimani, le chef de la force Qods chargée des opérations extérieures de l'armée d'élite du régime, a porté sur l'absence de « volonté de combattre Daech » des Etats-Unis accusés de complicité dans le complot mené contre l'Irak. Des complicités révélées par le soutien des alliés régionaux et l'acheminement du pétrole des zones contrôlées par Daech à travers des pays membres de la coalition. « Pour quelle raison, ils (les Etats-Unis) trompent l'opinion publique mondiale en créant des coalitions mensongères pour soi-disant lutter contre Daech qui n'est pas réprimé » malgré tous les crimes commis dans les pays de la région, s'est interrogé Souleimani. Engagé dans le combat contre Daech, l'Iran a immédiatement délégué le ministre de la Défense, le général Hossein Dehghan, à Bagdad au lendemain de la chute de Ramadi. En même temps, le général Ahmad-Reza Pourdastan, chef de l'armée de terre iranienne avait demandé au Parlement des fonds supplémentaires pour lutter contre le terrorisme, aussi présents au Pakistan et en Afghanistan. L'enjeu est décisif pour la stabilité et la paix dans la région menacée par ce que le chef du Hezbollah chiite, Hassan Nasrallah, a appelé le « danger existentiel ». L'urgence de la lutte contre les causes profondes de l'implantation de Daech en Irak et en Syrie conditionne, selon la chef de la diplomatie européenne Federica Mogherini, son éradication. Elle a plaidé pour une solution politique dans un Irak « solide, démocratique, intégrant toutes ses composantes » et en Syrie « sur la voie de la transition démocratique et de la transition nationale ».