«Si une force ouest-africaine venait à débarquer à Abidjan, cela ne sera pas sans conséquence pour les pays de la région» Les chefs d'Etat et de gouvernement de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) perdent patience. Dans un communiqué publié à l'issue de six heures de discussions à Abuja, Nigeria, ils estiment que le départ de Laurent Gbagbo est «non négociable». Ils lui demandent pour la dernière fois de s'en aller s'il ne veut pas subir les conséquences des mesures qu'ils prendront pour installer Alassane Ouattara comme président légitime. «En cas de rejet de cette demande non négociable, la Communauté n'aura d'autre choix que de prendre toutes les mesures nécessaires, y compris l'usage de la force légitime, pour réaliser les aspirations du peuple ivoirien», prévient l'organisation régionale. C'est la première fois depuis le 28 novembre, début de la crise, que Gbagbo, qui a ignoré ultimatums et sanctions, est directement sous la menace d'une opération militaire et de poursuites «dans les délais les plus brefs» devant les tribunaux internationaux pour «violations des droits humains». Mais avant de passer de la parole aux actes qui ne sont pas encore définis - les chefs d'état-major de la CEDEAO devraient se réunir pour examiner les modalités d'intervention et planifier les actions futures- les présidents de l'Afrique de l'Ouest consentent à accorder une dernière chance à leur homologue. Ils enverront «prochainement» un émissaire de haut niveau à Abidjan pour l'exhorter à faire une sortie pacifique. Gbagbo qui sait désormais que le recours à la force contre lui est possible, joue la montre. Il espère l'émergence de désaccords entre ses «voisins». «Si une force ouest-africaine venait à débarquer à Abidjan, cela ne sera pas sans conséquence pour les pays de la région», préviennent ses partisans, plus convaincus que jamais que le dialogue est possible avec le camp Ouattara si celui-ci respecte la Constitution, c'est-à-dire admet que le pensionnaire du palais présidentiel reste assis dans son fauteuil. Ouattara qui est soumis à un blocus des forces pro-Gbagbo, appelle l'armée à assurer sa «mission républicaine de protection des populations contre les miliciens et mercenaires étrangers qui font couler le sang des Ivoiriens». Comme pour dissuader les légalistes, il annonce la constitution d'une Commission d'enquête nationale et l'arrivée «dans tous les prochains jours» d'une mission de la Cour pénale internationale pour faire la lumière sur les derniers événements. La Côte d'Ivoire va-t-elle replonger, après ce dialogue de sourds, dans la guerre civile comme en 2002-2003 ?