La presse a changé en Algérie mais la situation socioprofessionnelle des journalistes ne s'est pas beaucoup améliorée. Beaucoup de professionnels de la presse continuent de vivre dans la précarité malgré l'existence de lois et règlements censés garantir à la corporation l'exercice du métier dans des conditions dignes. Le problème des salaires des journalistes revient ainsi pour rappeler, avec acuité, l'existence et l'étendue de cette précarité. En dépit de l'adoption d'une nouvelle grille de salaire par les pouvoir publics, en vigueur depuis 2013, les salaires de la quasi-majorité des journalistes de la presse n'ont pas beaucoup évolué. Si le secteur public applique rigoureusement la grille, la presse du secteur privé ne suit pas. Les quelques titres ayant fini par accorder des augmentations conséquentes à leur personnel pour se rapprocher, quelque peu, du barème en vigueur, ont dû céder à la pression du personnel. Sinon, la quasi-totalité des journalistes continuent d'être sous-payés en contrepartie d'un travail censé être noble et risqué. Le problème du logement des journalistes est un autre dossier brûlant. Si certains d'entre eux ont réussi à bénéficier d'un toit par leurs propres moyens ou dans le cadre des formules d'accès au logement initiées par l'Etat, beaucoup d'autres continuent de vivre dans des conditions inconfortables. L'exemple des journalistes encore logés dans des chambres sécuritaires à Sidi Fredj et à Zéralda reste une tache noire dans l'histoire de la corporation. Pour des raisons d'éloignement de leur lieu de résidence, beaucoup d'autres eux recourent à la location. Faible revenu et cherté de loyer font qu'ils se voient contraints de trouver des formules de location en groupe. Les moins nantis vivent dans les chambres d'hôtel, voire des hammams ! A ce jour, beaucoup de jeunes journalistes, notamment ceux exerçant dans des journaux nouvellement créés, ne bénéficient pas de la sécurité sociale. Cette situation consacre ainsi le travail informel dans une corporation censée défendre les droits des citoyens et l'Etat de droit. « Nous sommes un peu dans la situation du cordonnier mal chaussé », ironise un confrère. Au sein des rédactions, le manque d'espace et de moyens fait que les journalistes utilisent leurs propres outils. Il arrive aussi qu'ils se déplacent avec leurs propres moyens et payent de leur poche pour effectuer un travail, pourtant demandé par l'employeur. « Le cordonnier mal chaussé » La dégradation de la situation socioprofessionnelle des journalistes est certes le résultat d'un manque d'organisation de la corporation. L'absence d'un syndicat fort et légitime est la principale tare de cette corporation. Toutes les tentatives entreprises pour parer à cette désorganisation furent vouées à l'échec. L'éclatement du Syndicat national des journalistes (SNJ), qui n'a pas tenu son assemblée générale depuis une dizaine d'années, fait que la corporation se retrouve dans la posture d'un enfant orphelin. L'échec de la Fédération nationale des journalistes (UGTA), gelée quelques mois après sa création suite au retrait des membres de son bureau national, a fait que ce syndicat n'a rien apporté à la corporation. Il n'a même pas réussi à se structurer en créant des sections syndicales dans les rédactions. Conscients de la gravité de la situation, des journalistes tentent depuis de mener de s'organiser pour trouver une issue à cette impasse. Les journalistes sont-ils toutefois prêts à faire aboutir ces initiatives ?