La fête religieuse Achoura (correspond au dixième jour du mois de moharram, premier mois de l'année de l'Hégire), est célébrée par les populations de Ghardaïa dans leur diversité sociologique, par le recours à une recette ancestrale très prisée dénommée « Ibaoun » en tamazight, « El Foul » (fèves). Dès le début du mois de moharram, les ménages se mettent déjà dans l'ambiance et se préparent à recevoir l'Achoura dans la pure tradition religieuse à travers les prêches dans les mosquées mais également la ruée sur l'approvisionnement en fèves sèches mises en vente dans différentes ruelles et autres places squattées par des marchands de cette légumineuse très prisée à Ghardaïa. Une fois de plus, les rues et ruelles bruyantes de la vallée du M'zab connaissent une activité intense. Les gens y viennent, à cette occasion, pour faire leurs emplettes surtout en fèves, fruits secs et aussi pour acheter des cadeaux. « Cette fête a une signification particulière dans nos traditions et coutumes », a indiqué, à l'APS, Fatima, une vieille dame rencontrée à la place Andalouse avant de préciser : « Nous préparons ce plat dix jours avant la nuit de l'Achoura. » « C'est une fête sacrée », confie, de son côté, une quadragénaire, mère de trois enfants, estimant que c'est une occasion pour revivifier bon nombre de traditions locales culinaires, notamment « Ibaoun ». Traditionnellement, deux mets, appréciés par les habitants du M'zab, à savoir « ibaoun » et « ouchou tini », sont préparés à l'occasion de la célébration de l'Achoura, fête de sauvetage du Prophète Moussa des mains du Pharaon. « Ibaoun », ce plat du terroir incontournable, se prépare la veille où la ménagère trempe dans de l'eau douce de la palmeraie de Ghardaïa des fèves sèches durant plusieurs heures avant de les faire bouillir à petit feu toute la nuit. Assaisonné avec du sel, du cumin et de l'huile d'olive, il se déguste dans la matinée et est distribué aux voisins et passants par les enfants en chantant une chanson populaire « Abia Nouh ». Selon la tradition mozabite, ce plat se consomme la matinée de la veille de l'Achoura. Il s'échange entre familles pour, dit-t-on, renforcer les liens et la solidarité entre les habitants. Diversité culinaire Le deuxième plat est un couscous à la viande succulente du chamelon cuite dans une sauce épicée et sucrée à base de dattes dont seules les ménagères du M'zab ont le secret. Assaisonné de beurre salé fondu et de raisins secs, ce couscous se consomme après la rupture du jeune de l'Achoura. Des confiseries, friandises et autres fruits secs, amandes, cacahouètes et noisettes, sont également offerts aux enfants. Perçue comme une fête de l'enfance, la tradition veut que la veille de l'Achoura, les femmes mettent à leurs enfants du « khôl » (poudre d'antimoine que l'on met sur le contour des yeux) qui donne au regard une profondeur et une luminosité. Tous les aspects festifs de l'Achoura ne devraient pas faire oublier sa portée religieuse, a fait savoir Ammi Bakir, un notable de la région, ajoutant que c'est l'occasion pour les fidèles et pieux d'accomplir davantage de bonnes actions telles que le jeûne, l'acquittement de la zakat et aussi de se rendre aux cimetières afin de se recueillir sur les tombes de leurs proches et de participer à une action de nettoiement des tombes.