En marge de la 8e édition du Salon du livre du Djurdjura qui s'est déroulée récemment à Tizi Ouzou, et dédiée aux écrits en tamazight et en braille, nous avons rencontré M. Abderrahmane Amalou. Il est le patron de la maison d'édition « Voir par le savoir », qui accomplit un travail remarquable en direction des non-voyants. Cette frange de la population souffre de la rareté de moyens ludiques, à même de la faire sortir de l'obscurité dans laquelle elle se retrouve plongée. M. Amalou, par ailleurs auteur-compositeur et écrivain, a eu l'ingénieuse idée de se lancer dans l'édition dédiée aux non-voyants mettant sur le marché des œuvres reproduites en braille. Pour lui, « les non-voyants sont des citoyens à part entière ». « Qui d'entre-nous n'a pas dans son entourage un non-voyant ? Qui d'entre-nous ne souffre de voir un proche doué d'intelligence mais qui n'est pas heureux de ne pas être comme tout le monde ? » s'interrogera-t-il d'emblée pour expliquer ce pari fou. « Le plus important est d'offrir aux non-voyants la possibilité de reproduire leur inspiration interne, leur imaginaire, leur monde à eux », ajoute-t-il. Il compte déjà dans son catalogue plus de 15 œuvres littéraires. L'aventure entamée en 2005 était risquée car l'édition, surtout en braille, rencontre de nombreux écueils. Toutefois, l'initiative a déjà porté quelques fruits. « Dix ans après, nous avons atteint notre premier objectif, éditer les poésies d'une jeune non-voyante récompensée tout récemment. Il a été décidé, ensuite, avec le HCA et la maison de la culture Mouloud Mammeri, de lancer un concours littéraire destiné aux non-voyants et ouvert à toutes les expressions et toutes les langues. » La meilleure œuvre sera récompensée financièrement et matériellement avec l'édition, pour le compte de ma maison d'édition en supports braille et audio », a-t-il confié. « A travers ce concours, nous voulons constituer un fonds documentaire destiné aux non-voyants. Notre boîte dispose déjà d'une quarantaine d'œuvres transcrites en Braille », précise-t-il. L'autre défi que s'est lancé Abderrahmane Amalou est celui de la transcription en braille de tamazight. « C'est une langue nationale que je sache. Elle mérite sa place au même titre que toutes les langues dans les librairies. Il était nécessaire pour moi de faire sa transcription en braille quel que soit le prix. C'est pour moi un militantisme, non pas dans son sens politique du terme mais dans son contexte littéraire. Une sorte de contribution en direction de cette frange de la société qui mérite tous les égards ». Enfin, Abderrahmane Amalou espère voir, dans un proche avenir, un auteur non-voyant écrire en tamazight et en braille. Il peut se faire une place au soleil, à l'instar du chanteur Brahim Tayeb. Il est à rappeler, enfin, que la maison d'édition consacre beaucoup de moyens à la promotion du livre en braille. Lors du salon, elle a offert gracieusement des ouvrages et manuels aux non-voyants et à leurs familles.