Vous avez été installé par le ministre de la Culture à la tête du nouvel Opéra d'Alger. Comment concevez-vous les missions de cette institution ? Tout d'abord, c'est un honneur pour moi que de présider aux destinées de cette prestigieuse institution à laquelle je consacrerai toute mon énergie et, humblement, mon savoir et mon expérience. L'Opéra est un pôle culturel d'excellence dont les missions seront la capitalisation des acquis et le rayonnement artistique. Avec le triptyque « Ensemble symphonique national », « Ballet national » et « Ensemble national andalou », c'est une véritable orfèvrerie pour le bonheur de tous sur laquelle s'articulera l'activité de l'Opéra. Le préalable, cependant, à cette dynamique artistique féconde sera évidemment la mise en place des outils de fonctionnement. Le genre opéra n'est pas très développé en Algérie, sinon réduit à quelques spectacles occasionnels. Pourquoi ? Je crois que cette question trouve sa réponse dans notre propre histoire et itinéraire artistique. Cependant, des efforts ont été fournis par certains artistes et ensembles, à l'exemple de l'Orchestre symphonique national, pour remettre au goût du jour, à travers leurs créations ou reprises d'œuvres universelles, ce genre particulier. Sachant votre longue et riche carrière musicale, puisque vous avez composé un certain nombre de spectacles dans le genre, présentés notamment lors de la grande manifestation mondiale, « l'Exposition universelle », allez-vous, à travers cet organisme, aider à la formation des jeunes talents ? En tant que pôle artistique majeur, il est évident que l'Opéra d'Alger jouera pleinement son rôle de bonification des talents. Cet organisme ne peut, cependant, se substituer aux institutions de formation, à savoir associations, conservatoires, instituts de musique et autres écoles liées à l'objet. La réalité même de l'Opéra ainsi que les exigences d'excellence qui le caractériseront, désormais, insuffleront, je le souhaite, la prise en charge qualitative des talents à dessein d'enrichissement des institutions existantes en général et de l'Opéra en particulier. Lié traditionnellement à la musique symphonique et à la chorégraphie, le nouvel Opéra s'ouvrira-t-il à d'autres répertoires, la musique andalouse par exemple dont vous êtes l'une des figures de proue ? Tout l'intérêt justement réside dans cette ouverture, non seulement aux champs traditionnellement investis, universels notamment, mais aussi à cet univers si fécond de la culture algérienne dans son ensemble musical et chorégraphique. Cela sera l'occasion d'éclosion, j'en suis convaincu, de talents multiples qui caractérisent notre société et son dynamisme. Y aurait-il, dans le futur, des programmes de coopération avec les opéras dans le monde, arabe ou non ? Il est clair que l'ouverture vers les expériences des autres pays serait une des clés de notre propre réussite : arabe, africaine et universelle, dans tous les cas, vers celles qui consacrent et élèvent l'homme et donnent du sens. Dans cette optique, des programmes de coopération seront évidemment étudiés, élaborés et concrétisés. Biographie Petit-fils du barde du melhoun, Mohamed Benguitoun, auteur de la fameuse élégie de Hizya, Noureddine Saoudi est né à Alger en 1954. Très jeune, il fit ses débuts dans la musique auprès de grands maîtres de la musique andalouse tels que son cheikh Abdelkrim Dali, Abdelkrim M'hamsadji, Abderrezzak Fakhardji ou encore Abderrahmane Belhocine. Il cofonda et dirigea l'orchestre de l'association Essendoussia pour laquelle il obtiendra, par deux fois consécutives (1987-88), le premier prix du Festival du printemps musical d'Alger. En outre, il a enregistré, jusqu'en 2004, quatre CD dans les modes zidane, raml el maya, ghrib, et hcine. Il présidera également aux destinées de l'orchestre de l'association El Andaloussia qui a représenté, en 1998, l'Algérie à Lisbonne dans le cadre de l'Exposition universelle et chantera en duo avec Filipa Païs, la grande diva du fado portugais. Il renouvellera l'expérience en 2008 dans la ville espagnole de Saragosse après avoir enregistré un album, une première dans les annales de la musique andalouse, d'une nouba, intitulée « Nouba Dziria », dans le mode sahli, qu'il a personnellement composée. Docteur en géologie du quaternaire, maître de recherche en préhistoire au Centre national de recherche préhistorique, anthropologique et historique (CNRPAH) (ex-CRAPE), il est auteur de quelques ouvrages dont « Pliocène et Pléistocène inférieur et moyen du Sahel occidental d'Alger », « Les Temps préhistoriques en Algérie » ainsi qu'un roman, « L'Autre rive du paradis ». Texte tiré du Dictionnaire encyclopédique de l'Algérie, d'Achour Cheurfi