Partout le même décor : décharges sauvages, gravats, nuées de sachets noirs, bouteilles de plastique, parsèment le parcours des routes principales et même celles menant aux villages et autres hameaux. Mais ce qui est le plus frappant, ce sont ces milliers de bouteilles et de canettes de bière vides jetées aux abords des routes, dans les rivières, les forêts, ou laissées sur les plages. La pollution est là et menace la nature et même la santé publique. Certaines associations, en collaboration avec les collectivités locales qui mettent à leur disposition leurs moyens humains et matériels, s'attellent à collecter ces détritus pour nettoyer un tant soit peu ces espaces. Mais la tâche semble immense aux résultats souvent décourageants.« Dès qu'on collecte ces bouteilles vides on les met dans des sachets poubelles. Les employés des APC passent pour tout ramasser dans des camions. Le lendemain, nous sommes confrontés de nouveau au même problème. D'autres bouteilles vides sont jetées », regrette un membre d'une association de la commune de Takhoukht. Hamid, un employé de la voirie de la commune d'Aït Mahmoud, confirme cet incivisme. Lui qui a participé à la collecte des détritus au barrage de Taksebt, soutient que les rivages de ce lac artificiel sont pratiquement jonchés de déchets ménagers, de détritus inertes, de bouteilles vides et bien d'autres ordures ». Et d'enchaîner : « Notre commune organise des campagnes de volontariat avec la participation des associations et de la population locale. Elle met tous les moyens nécessaires à cet effet, mais en vain. » Tout le long de la route qui longe le barrage, pas un mètre n'est épargné par ces bouteilles et canettes abandonnées ou carrément lancées sur les abords. « On devrait effectuer des aménagements sur ce site naturel, pour recevoir les familles en mal de villégiature. On peut y installer, par exemple, des petites échoppes, des restaurants, des aires de jeux pour les enfants, des parkings, un grand espace pour pique-niquer. Les promeneurs y trouveront un endroit pour la détente et le loisir. Mais tout cela sous l'œil vigilant de la commune qui doit prendre en charge la gestion », propose Nadir, cadre dans une société nationale, natif de la région. Justement des jeunes, qui pique-niquent sur les rives du barrage, expriment leur désarroi face à l'état dans lequel se trouve cette zone. « Ce site est paradisiaque. Certains individus n'estiment pas ce massif à sa juste valeur. D'abord, il renferme une faune et une flore très diversifiées. C'est le poumon de la région. Les caractéristiques topographiques, géologiques et hydrologiques de cette région font qu'un microclimat s'y est installé », argumente Lounès, biologiste dans un laboratoire pharmaceutique. Pire : « La pollution menace la vie sauvage. Le verre brisé, qui met 3.000 à 4.000 ans pour se biodégrader, provoque à la saison des grandes chaleurs des feux de forêt qui détruisent l'habitat naturel de plusieurs espèces animales. » Son ami ajoute : « Le barrage Taksebt est un acquis important pour la région, sur le plan économique et social. Il a apporté un plus à ce site que nous nous devons de préserver et de protéger. » A la station de l'Algérienne des eaux de Takhoukht, Kamel, employé, se souvient de la propreté des lieux il y a... 15 ans. « Cette pollution n'existait pas auparavant. Les gens, qui baignaient dans cette belle nature, ont appris à la respecter et à protéger leur environnement », précise-t-il. Mais, selon lui, les débits informels de boissons alcoolisées, qui sont disséminés à travers cette zone, sont la principale source de ces atteintes à l'environnement. « Les services de sécurité sont carrément absents et les vendeurs illicites continuent à exercer leur activité sans être inquiétés », affirme-t-il. Un automobiliste, outré par ce paysage envahi par les bouteilles vides et les sachets noirs, peste : « Il faut instaurer une amende pour arrêter ce gâchis et les autorités locales et les associations doivent agir. Initier des actions de sensibilisation, organiser des collectes de déchets... pour sauver ce patrimoine naturel. » Son compagnon affirme, pour sa part, que le même phénomène est visible partout à travers la wilaya. « La pollution gagne du terrain et les citoyens dans leur majorité restent insensibles à ce problème », regrette-t-il. Et pourtant, de l'avis de beaucoup de citoyens, Takhoukht est une région qui recèle des atouts naturels propices au développement de l'écotourisme, qui créera de la richesse et de l'emploi. « Les pouvoirs publics devraient étudier cette possibilité pour le développement de cette région », soutiennent-ils.