Le drame des familles expulsées continue. Même en hiver. « Une famille a été délogée sous les pluies torrentielles à Bouzaréah », a affirmé le président du comité national SOS familles expulsées, Hakim Salmi. Selon lui, aucune loi n'interdit à un juge de prononcer la décision d'expulsion et l'huissier de justice exécute froidement cette sentence. « Le côté humain est carrément éludé », dit-il. Selon lui, quelque 1500 familles ont été expulsées à ce jour à l'échelle nationale. Ces familles se retrouvent, selon Hakim Selmi, devant un dilemme : chercher une location souvent à un prix excessif qui dépasse leur budget ou un hébergement temporaire chez des proches parents, sinon, elles n'auront que la rue et une tente pour s'abriter. Le dernier cas recensé concerne une famille qui résidait à Télemly (Alger) depuis 1958 et qui a été expulsée par des proches. Généralement la famille expulsée occupe un bien vacant que lui disputent des proches. Depuis la création de ce comité en 2009, des requêtes de familles expulsées atterrissent à cette structure qui sert d'intermédiaire entre les expulsées et les autorités concernées. Le problème des expulsions est perçu par Hakim Salmi comme « une bombe à retardement ». Le comité fait de son mieux pour « faire retarder les expulsions et aider les familles à gérer l'action en justice le temps de trouver un logement », souligne-t-il. Ce qu'il déplore aussi c'est l'anarchie qui règne dans le marché de l'immobilier avec une liberté des prix qui influe négativement sur le budget familial. Le président de SOS familles expulsées signale également que les notaires acceptent de fausses déclarations sur les prix de la location émises par les propriétaires de logements. « Il n'y a aucun barème, aucune réglementation qui fixent les prix de la location ce qui fragilise davantage le budget des familles contraintes à louer. En outre, le locataire perd son droit au logement en quittant la commune où il résidait ce qui le contraint de louer dans cette commune », explique-t-il. A cela s'ajoute le traumatisme vécu par les membres de la famille expulsée et notamment les enfants qui n'ont plus de repères. « Les enfants scolarisés sont perturbés du fait de se déplacer d'un endroit à un autre. D'excellents élèves sont devenus médiocres parce que du jour au lendemain ils ont changé d'établissement scolaire », souligne Salmi. Aussi préconise-t-il la création d'une ville pour ces sans-domicile-fixe outre la prise en charge des enfants traumatisés par l'expulsion. « Quelqu'un qui est privé de logement n'a pas de dignité. Où sont les droits de l'homme et les droits de l'enfant ? Où est la citoyenneté de la personne qui n'a pas un chez soi ? », s'interroge-t-il. Salmi affirme que des correspondances adressées aux autorités locales concernées restent lettre morte. « Les quelques réponses qui nous parviennent nous informent que le dossier est à l'étude », souligne-t-il.