Le président du Conseil de la nation, Abdelkader Bensalah, a déclaré, hier, à l'issue d'une conférence dédiée aux massacres du 8 mai 45, que des responsables politiques français dont des parlementaires n'ont toujours pas « digéré » l'indépendance algérienne. Pour preuve, « ils n'hésitent pas à lancer des appels au peuple français via les réseaux sociaux pour s'enorgueillir de cette date. Certains d'entre eux ont même osé exhorter les Français à glorifier le colonialisme français en Algérie ». Ce qui entrave, d'après lui, l'ouverture d'une nouvelle page entre les deux pays tournée vers la promotion des intérêts communs. Il a ajouté que les massacres du 8 mai 45 sont des crimes d'une « grande atrocité ». Ce qui les classe dans la catégorie des « crimes contre l'humanité ». Bensalah a affirmé que la commémoration des événements historiques n'a pas seulement une portée symbolique mais elles est aussi un rappel, à ceux qui de l'autre côté de la Méditerranée veulent dissimuler leur triste passé en Algérie, que la mémoire ne s'oublie pas. Le président du Conseil de la nation affirme que la réalité coloniale doit être reconnue par ceux parmi les Français qui tentent vainement de blanchir le système colonial des actes criminels commis contre le peuple algérien. Partant du principe que la reconnaissance historique n'est pas occasionnelle, Bensalah rappelle que la nouvelle constitution initiée par le président de la République est intervenue justement « pour consacrer le respect des symboles de la guerre de libération, tout en plaidant pour l'entretien de la mémoire collective et la promotion de l'écriture historique ». L'historien Mohamed El Korso, qui a présenté une communication intitulée « un crime non reconnu », dira que « des négationnistes et des révisionnistes » français continuent à nier des faits historiques avérés. Ce qui a été d'ailleurs sanctionné par la promulgation d'une loi glorifiant le colonialisme en Algérie en 2005. Selon lui, tout ce qui a été fait dans ce sens par la partie française n'est autre « que de la poudre aux yeux ». Il y a une différence de forme seulement dans les déclarations de la classe politique française. Le « fond » est le même dans la mesure où Nicolas Sarkozy et François Hollande se contentent de dire « qu'il faut regarder de l'avant pour construire l'avenir ». « Mais qui s'occupera du legs historique ? », affirme-t-il en plaidant « pour la personnalisation de ces crimes » afin de connaître les vrais auteurs. Mohamed Bousoltane, directeur général du centre d'études et de recherche constitutionnelles, qui aborde cette question du point de vue juridique, considère que les massacres du 8 mai 45 sont imprescriptibles en tant que « génocide » placé à la tête des crimes universels reconnus par les Nations unies. Le traité de Rome est clair, selon lui, puisque ses articles 29 et 64 énoncent que tous les crimes sont imprescriptibles et entrent dans le cadre de la compétence universelle. Y adhérer est cependant facultatif. L'avocate Fatima Benbraham ainsi que l'historien El Korso ont regretté le fait « que les archives algériennes soient inaccessibles aux chercheurs ainsi qu'aux juristes ». D'où l'incapacité d'engager un travail de mémoire « à la hauteur de notre glorieuse révolution ». El Korso a également soulevé le problème de la statistique quasi-inexistante sur les faits historiques. Les intervenants ont évoqué notamment la nécessité « de passer à l'acte » afin d'obliger la France officielle à reconnaître ses crimes, que ce soit par une loi criminalisant le colonialisme ou par des « démarches » diplomatiques susceptibles d'imposer à la France de reconnaître ses « responsabilités ».