«Je suis ici parce que je tire ma légitimité de vous» Chafik s'en va, Charaf arrive. Le mouvement de protestation de la place Tahrir ne compte plus ses victoires. Après avoir déboulonné de son fauteuil Hosni Moubarak, c'est le premier ministre, Ahmed Chafik, que les jeunes du 25 janvier ont réussi à chasser, jeudi dernier, de la tête du gouvernement, suite aux appels incessants au Conseil suprême des forces armées pour en finir avec symboles de l'ancien régime. Ce n'est pas tout, ce n'est pas rien, puisque à peine la démission de Chafik annoncée, l'armée qui a fixé la journée du 19 mars, pour la tenue du référendum sur les amendements à la Constitution, a chargé l'ancien ministre des Transports, M. Essam Charaf, de former un nouveau gouvernement, suscitant la satisfaction de la classe politique, le Comité de coordination des manifestants en tête. Même en sa qualité d'ancien ministre de Moubarak, le soutien qu'il a apporté publiquement à la révolution, et ses multiples apparitions à la place Tahrir, ont accrédité sinon conforté l'image de celui qui a tenu tête à l'ancien Premier ministre Ahmed Nadhif, poulain du raïs déchu. A tel point populaire d'ailleurs que les jeunes manifestants ont proposé son nom au cours d'une rencontre dimanche dernier avec les généraux du Conseil suprême des forces armées, pour diriger le gouvernement de transition. «Je suis ici parce que je tire ma légitimité de vous (...). Je déploierai tous mes efforts pour répondre à vos revendications», leur dit-il. Cette «démission-nomination» intervient, rappelle-t-on, suite à l'appel à la manifestation du million prévue hier à laquelle plusieurs associations politiques et organisations de jeunes ont appelé, en vue d'insister sur la nécessité de répondre aux revendications de la révolution (démission du gouvernement de Chafik, formation d'un nouveau gouvernement de transition, limogeage de tous les gouverneurs, dissolution des assemblées locales et désignation de personnalités indépendantes…) « Nous sommes contents, nous avions proposé son nom et notre demande a été acceptée», déclare un des responsables de la Coalition des jeunes de la révolution, Chadi al-Ghazali. «Le régime déchu est tombé avec la chute de Moubarak et de son gouvernement, nous sommes sur la bonne voie», estime l'opposant Mohamed El Baradei, ajoutant : «J'exprime ma sincère appréciation au Conseil suprême des forces armées qui a accepté la demande du peuple».