Le bilan de l'intervention militaire, lancée depuis une semaine, reste mitigé. Bien que le président américain rassure sur la No-fly zone qui sera instaurée «sous peu», le défi de Kadhafi qui se prépare à la «bataille qu'elle soit longue ou courte» et à la victoire finale se pose avec plus d'acuité. Les attaques n'ont guère cessé à Ajdabia où les combats font encore rage, à Misrata où 17 personnes ont été tuées par des tirs de snippers et des obus, à Yefren (9 morts) qui a été la cible d'une «offensive meurtrière», dans la région d'Al-Jabal Al-Gharbi et à Zenten. Pourtant, depuis le début de l'opération, des navires et sous-marins américains et britanniques avaient tiré 162 missiles de croisière Tomahawks, dont 112 au premier jour. Selon le Pentagone, les avions de la coalition internationale ont effectué, à ce jour (mardi), un total de 336 sorties (96 pour les dernières 24 heures seulement) et conduit 108 frappes aériennes. Ces frappes aériennes de la coalition «continuent à cibler les centres de commandement, les systèmes de défense anti-aérien, et les chars», a déclaré le porte-parole. La coalition euro-atlantique, minée par des divergences de fond, connaît ses limites. L'après-Kadhafi n'est pas pour demain. Même si le lobbyiste BHL au profit de l'opposition, intronisé en «nouveau ministre des Affaires étrangères», tente de dresser les contours d'une alternative «laïque et démocratique», l'option du changement interne reste difficile à réaliser en raison du rapport de force inégal entre un régime suréquipé et le mouvement insurrectionnel désorganisé et aux moyens rudimentaires. La survie du régime a amené Obama à prévoir d'autres cartes que l'option militaire pour en finir avec le dirigeant libyen qui «pourrait essayer de se terrer et d'attendre, même face à une zone d'exclusion aérienne». Le scénario inefficace de la no-fly zone se renforce certes de la prise en main par l'Otan qui accepté la mission de surveillance de l'embargo sur les armes contre la Libye, en assignant des navires et des avions à cette mission. Lors des questions hebdomadaires au Parlement, le Premier ministre britannique, David Cameron, a annoncé le «soutien logistique» du Koweït et de la Jordanie qui vient s'ajouter à la participation qatarie. La Turquie se met aussi de la partie, en mettant un sous-marin et 5 navires à la disposition de l'Otan pour faire respecter l'embargo sur les armes imposé à la Libye, a annoncé hier un général de l'Alliance atlantique à Bruxelles. En Europe, le non allemand s'étend à l'Otan. Le passage du témoin d'une coalition à la peine à l'Otan n'a pas réglé la question de fond liée au commandement qui divise la coalition. Le «rôle-clef», évoqué par Washington, est dédaigné par Paris plutôt acquis à une «utilisation des structures de commandement de l'Otan en soutien de la coalition». Lors d'une conférence de presse, le ministre des Affaires étrangères français, Alain Juppé, a précisé que l'Otan n'exercera pas «le pilotage politique» de la coalition, mais interviendra comme «outil de planification et de conduite opérationnelle» dans la mise en œuvre d'une zone d'exclusion aérienne, prévue par la résolution 1973 du Conseil de sécurité de l'Onu. Il sera confié à un «groupe de contact» réunissant les ministres des Affaires étrangères des Etats participant à l'intervention, la Ligue arabe et l'Union africaine. La première rencontre de Londres, prévue mardi prochain, marque, selon le chef de la diplomatie française, le passage de la première phase du «commandement américain en étroite liaison avec les Français et les Britanniques» à la mise en avant de l'UE-Otan pour l'action humanitaire et la conduite des opérations. Un autre Afghanistan au cœur de la Méditerranée ? Deux choix possibles. Paris croit et opte pour une «opération de courte durée». La crainte d'un enlisement ? Washington préfère prendre ses distances. L'effet du syndrome de la troisième guerre en terre arabo-musulmane ?