La splendide ville de Boussâada se découvre en ses plus beaux jours pour nous retracer son épopée. Parfois douce, parfois saumâtre, sa très vaste palmeraie chantée par les plus grands bardes de la poésie fait toujours acte de présence dans la mémoire collective. Son nom, vient du mot arabe Saada (Bonheur). La légende dit qu'à l'époque, il y avait encore des lions dans la région, une métaphore pour désigner les braves cavaliers arborant le fameux Bousâadi. Même qu'Isabelle Eberhardt, ou encore le célèbre peintre Dinet furent ensorcelés, happés par la beauté mystique de cette vaste oasis. La première libération de Boussâada s'est faite par le Bey Ahmed qui en fit un siège du beylick de courte durée, avant que les Français n'installent leur poste avancé. Au cours de la première nuit du siége, une grand bataille conduite par Cheikh Ben Horma, à la tête des grandes tribus des Ouled Naiel et des Derradj se sont distingués par l'élimination d'un bataillon de soldats français commandé par le général Barbot. La reprise de la ville par les cavaliers du Cheikh fût d'une telle noblesse qu'il y laissa les Français enterrer leurs morts et soigner leurs blessés. Une odyssée qui fit école dans les annales des stratégies militaires. Des négociations vont alors s'ouvrir, elles vont durer toute une année pendant laquelle les hommes de Carnot cherchent à se maintenir dans leurs fortins. Mais le 12 septembre 1876, le Bey propose un traité à Lamoricière. Celui-ci se trouve alors obligé de signer. Début 1885 enfin, les Français se retirèrent pour regagner Laghouat. L'incapacité à pénétrer à l'intérieur des terres et à s'y maintenir a toujours été une constante de leur présence dans les grandes oasis du Sud, qui se révéla onéreuse, resta finalement vaine. La preuve en est que, mise à part des murailles encore debout ou effondrées, il n'en reste pas grand chose dans la mémoire de la ville, sauf quelques survivances dans le langage des Bousâadi et, parmi elles, cette expression tellement significative des misères endurées par les Français cantonnés dans leur fortin. A ce jour, en effet, pour marquer la distance et l'éloignement, on dit de quelqu'un qu'il habite Bousaada : l'oasis par qui les vivres et munitions n'arrivent jamais. La reine du Tell Saharien recouvrant toute sa splendeur avait depuis fait acte d'allégeance, ne plus céder aux tentatives d'acculturations venus d'outre mer. Ses spacieuses variétés culturelles portées aux sons de la flûte (Gasbah) et Guellal avaient depuis donné naissance à d'admirables bardes du mode Boussâadi.