Les patientes sont, juste après l'accouchement, renvoyées dans leurs foyers alors qu'elles ne sont pas totalement rétablies et ceci, uniquement, pour faire face aux exigences du nombre. Le service de maternité et de chirurgie obstétrique du CHU d'Oran fait face à une grande pression, accueillant, selon les informations fournies par le chef de ce service, jusqu'à 60 femmes quotidiennement. Cette pression a pour origine les petites maternités de proximité qui, pour le moindre petit motif, se débarrassent allégrement des femmes enceintes pour les envoyer à cette maternité qui ploie sous le nombre. Selon un obstétricien dans ce service, «les maternités de Point du jour, des Amandiers, de Sidi El Houari, d'Es Sénia et du centre-ville nous envoient régulièrement des femmes sur le point d'accoucher, se déchargeant, ainsi, de leur travail. Résultat, notre maternité, qui fait office d'Arche de Noé, connaît une grande pression qui se répercute fatalement sur la prise en charge et sur la qualité des soins». Selon une ancienne sage-femme rencontrée sur les lieux, «les cliniques de maternité de proximité font face, il est vrai, au manque de moyens humains et matériels, mais, souvent, elles fuient leurs responsabilités par peur de mal faire, se déchargeant, ainsi, sur nous de leurs parturientes». Résultat : la cinquantaine de lits de la maternité se révèlent insuffisants pour répondre à la demande ; mais comme il faut «obligatoirement» prendre en charge les femmes sur le point d'accoucher, on fait avec les moyens de bord. De ce fait, les patientes sont, juste après l'accouchement, renvoyées dans leurs foyers alors qu'elles ne sont pas totalement rétablies et ceci, uniquement, pour faire face aux exigences du nombre. Pourtant, selon nos sources, la quasi-totalité des cas qui sont orientés vers la maternité du CHUO ne présente aucune gravité particulière et peuvent, par conséquent, être prises en charge au niveau des maternités de proximité. Une vieille femme qui avait accompagné sa bru, qui était sur le point d'accouche, nous dira : «Ma bru avait ressenti des douleurs intenses et comme j'habite à Es Sénia, je l'ai amenée à la clinique publique de proximité pour savoir quand elle allait accoucher. Se rendant compte qu'elle était arrivée à terme, le personnel de cette clinique m'a conseillé de l'amener au CHUO où ils m'ont assuré qu'elle allait bénéficier d'une prise en charge plus sérieuse. Ce qui est effectivement le cas. Je n'ai pas pu m'empêcher de penser, cependant, à ce qui aurait pu arriver à la malade si elle avait accouché en cours de route vers l'hôpital.» Sur les lieux, un employé de la polyclinique d'Es-Sénia nous fera savoir, qu'à sa connaissance, la prise en charge des accouchements se faisait de manière normale, précisant aussi que seuls les cas critiques étaient orientés vers la maternité du CHU d'Oran. Selon un responsable du secteur sanitaire, «le manque de moyens humains et matériels qui se pose dans les établissements de proximité rend ardue leur mission. Et dans les cas des accouchements, les sages-femmes préfèrent souvent se soulager, pour les cas jugés difficiles, sur la maternité centrale du CHUO qui est dotée de tous les moyens nécessaires pour ne pas faire face à des difficultés qui peuvent, en cours de l'accouchement, s'avérer insurmontables». Plusieurs cas de familles de patientes qui ont attaqué le personnel de ces maternités pour des accouchements qui n'ont pas totalement réussi rendent ce personnel très pointilleux et très frileux. Résultat, au moindre doute, on oriente vers la maternité du CHUO afin d'éviter d'inutiles ennuis. Nous avons essayé de contacter le directeur de la santé pour en savoir un peu plus sur cette fuite dans les responsabilités, en vain.