Les attaques du 20 août 1955 ont été un tournant décisif dans l'histoire de la guerre de Libération. Elles n'étaient pas seulement militaires, car pour leurs auteurs, il s'agissait également d'internationaliser la question algérienne. Chose faite puisque l'événement fut médiatisé en Europe et aux Etats-Unis et la Guerre d'Algérie fut inscrite à l'ordre du jour de la 10e session de l'ONU (septembre 1955). Stratégiquement, Zighoud Youcef, chef de la zone II, voulait que l'opération soit de grande envergure. Plusieurs villes du Grand Constantinois sont touchées : Skikda, El Harrouch, Collo, Jijel, El Milia, Khroub, Guelma, Oued Zenati, Annaba, Azzaba, Saint-Charles, Robertville, Aïn Abid, Condée Smendou et Aïn Kechera. Les actions visaient les sites militaires et les infrastructures : routes, ponts, relais électricité et téléphone dans les fermes et les habitations des colons. L'objectif étant d'éparpiller les troupes françaises et faire jonction avec les Aurès et la Kabylie, intimider l'ennemi, récupérer les armes et répondre à la répression. Le commandant Zighoud Youcef et ses compagnons ont aussi desserré l'étau sur les Aurès, dix mois après le déclenchement de la guerre, période durant laquelle le commandement du FLN se trouvait en difficulté. «Le FLN était dans des conditions difficiles, surtout en politique. Il n'y avait plus de direction centrale sur place, les chefs étaient morts, ou bien arrêtés ou exilés. Zighoud Youcef s'est d'abord isolé puis a convoqué ses cadres pour leur dire: ‘‘Le destin de la Révolution repose sur nos épaules.'' Il a donc mené les attaques du 20 août 1955 pour relancer la Révolution. Les conséquences ont été importantes sur tous les plans. Il y a eu d'abord, la répression féroce comme réponse de l'armée française qui a notamment doublé ses effectifs. Pour les historiens, c'est à partir de cette date que la France est entrée en guerre. L'autre point important, c'est que le monde entier a eu écho de ces attaques et la question algérienne a de ce fait été inscrite à l'ONU. Donc, le 20 août représentait un tournant dans la guerre», nous précise le sociologue et historien Abdelmadjid Merdaci de l'Université Mentouri de Constantine. Côté français, on parle de 1.273 morts alors que la partie algérienne a recensé 12 000 victimes de la répression mortes, parmi elles des femmes et des enfants tués dans des exécutions massives. Trois jours plus tard, le 23 août 1955, le gouvernement français décide de rappeler le demi-contingent libéré en avril et décide aussi le maintien sous les drapeaux du premier contingent de 1954. Zighoud Youcef et ses compagnons venaient alors d'insuffler à la Révolution une dynamique nouvelle consistant à asseoir le combat révolutionnaire sur le terrain populaire, qui l'adopta définitivement.