Photos : Slimane Sari. La campagne de cueillette des dattes constitue chaque automne un évènement majeur à travers les oasis de la ville des Zibans tant l'effervescence qui s'y installe contraste nettement avec la léthargie quasi-totale qui marque ces lieux durant l'été. La production prévue cette année, selon le directeur des services agricoles de la wilaya de Biskra, Tahar Zahaf, est de 2,2 millions de tonnes soit 400 000 tonnes de plus par rapport à l'an dernier. Seulement, cette filière connaît des problèmes liés directement à l'exportation. «Les procédures ne sont pas encore tout à fait maîtrisées par beaucoup d'exportateurs » a-t-il fait savoir. L'exportation reste en effet très timide, du fait de « l'absence de moyens et l'insuffisance des efforts consentis par les pouvoirs publics pour aider cette filière à se développer davantage et à faire face à la concurrence », résume Youcef Ghemri, président de l'association des conditionneurs et exportateurs de dattes de la wilaya de Biskra. Dans le même sillage, ce responsable dénonce «les lourdeurs et la bureaucratie pour l'obtention des aides octroyées et ce, en dépit des mesures d'encouragement prises par les ministères de l'Agriculture et du Commerce et plus précisément le crédit RFIG». Dans ce sens, le PDG de l'entreprise d'exportation Sudaco dira que « l'exportation de la datte, contrairement aux autres pays, relève du parcours du combattant pour voir les produits algériens sur les étals des grandes surfaces étrangères ». « Les aides du ministère du Commerce remontent à l'année 2004 alors qu'une partie n'a été perçue qu'à la fin de 2009», dira M. Ghemri. Selon lui, et compte tenu des fluctuations des cours de la devise et des aides qui ne parviennent pas au moment des opérations d'exportation, il est difficile aux professionnels «d'établir les prix du produit et de faire de la concurrence sur le marché mondial». DES TONNES DE DATTES ACHEMINÉES VERS LA TUNISIE M. Ghemri avoue que « le désintéressement» de la tutelle, le non-octroi des crédits par les banques et la concurrence déloyale de nos voisins, notamment Tunisiens, les exportations ont été réduites en l'espace de quelques années. «Nous avons perdu presque tous nos marchés en faveur des Tunisiens qui, eux, n'ont ménagé aucun effort grâce à l'aide de leur gouvernement pour mieux organiser la filière, améliorer l'outil de production par l'entretien des palmeraies. Cela leur a permis d'avoir un produit sain, même s'il est de qualité moindre que celui de l'Algérie», a précisé le président de l'association. En faisant la comparaison avec le circuit tunisien de l'exportation, le P-DG de Sudaco affirme que le circuit tunisien est clair. «Il commence de l'agriculteur conditionneur en passant par le collecteur pour arriver à l'exportateur et c'est l'Etat qui veille sur le respect de cette traçabilité qui représente le maillon fort de ce produit», explique-t-il. De son côté, le président de la chambre d'agriculture, Ghemari Messaoud, abonde dans le même sens : « les Tunisiens sont accompagnés par l'Etat sur tous les plans, à savoir la pénétration du marché et tout ce qui va avec comme logistique, publicité, participation aux foires et expositions… ». Vu les avantages dont jouissent les agriculteurs tunisiens, beaucoup de commerçants et de fellahs algériens sont devenus leurs partenaires. Des tonnes de dattes algériennes sont acheminées vers la Tunisie pour y être exportées. L'anarchie que connaît le circuit de commercialisation a ouvert l'appétit à beaucoup de spéculateurs et intermédiaires qui détiennent le monopole des prix et de la qualité. Ils n'hésitent pas à mélanger les dettes de premier choix avec celles de troisième choix. Pis encore, outre l'anarchie dans la gestion, l'absence d'une logistique adéquate ne permet pas de propulser ce produit à la place qui lui revient sur les marchés étrangers. Autre lacune : «Le transport coûte les yeux de la tête pour les exportateurs. Certes, l'Etat a assuré 80% des coûts de transport, mais sur le terrain, rien ne s'applique», a dénoncé M. Ghemari.