Récolte n Ce rendez-vous annuel est intimement lié à l'économie des familles des paysans. Les producteurs de dattes, parmi les propriétaires de palmeraies, sont, dans de pareils moments, en état d'alerte car la cueillette exige la réunion de plusieurs facteurs. Cette période de cueillette qui coïncide avec le mois d'octobre – empreint dans cette région d'un cachet particulier –, est appelée fête de la datte. Hadj Bennacer du village Chatt à vocation agricole dans la commune de Aïn Bayda est, à l'instar des autres producteurs de dattes, à pied d'œuvre pour entamer cette opération ô combien délicate et importante pour la subsistance de sa famille. Pour lui, la saison de la cueillette des dattes est un moment social crucial pour les producteurs et leur famille car liée, pour la grande majorité d'entre eux, à la vie économique, sachant que la phœniciculture est leur principale source de revenus, en l'absence d'autres activités agricoles dans la région. Rencontré en compagnie de ses fils en train de nettoyer et d'entretenir son oasis qui compte 100 palmiers en prévision de cet événement tant attendu, Hadj Bennacer a confié ne jamais abandonner, sous quelques circonstances que ce soit, la phœniciculture qu'il a héritée de ses parents et grands-parents et qui constitue sa principale source de revenus. Il compte aussi transmettre cette passion du palmier à ses fils afin de perpétuer la tradition. Ce travailleur infatigable ne recule devant aucune difficulté et accomplit les efforts tant matériels, physiques que moraux qu'exige cette branche de l'agriculture. Sa volonté de fer est la clef de sa réussite. Il faut ajouter à cela le caractère «sacré et mystérieux de cet arbre» et sa place chez les musulmans, vu qu'il est cité dans le Saint Coran. Selon Hadj Bennacer, le palmier ensorcelle l'être humain et le domine. Cet envoûtement diffus ne se révèle que bien des années après, quand celui-ci subit cette passion et ne fait qu'un avec l'arbre qui l'accompagnera jusqu'à sa mort. Parmi les moyens requis pour la cueillette, un grand pan de tissu que l'on étale sous l'arbre par souci d'hygiène et de préservation des dattes qui tombent au moment de la coupe des régimes, une forte main-d'œuvre et des moyens de transport du fruit vers les lieux de stockage. Avant la cueillette un rituel est de mise. Les paysans répètent inlassablement des psalmodies en chœur ou en solo, implorant Dieu, le remerciant de la récolte ou sollicitant sa bénédiction pour l'année suivante. Les fellahs invoquent ainsi l'unicité de Dieu et louent les vertus du prophète (QSSSL). Les grimpeurs de palmiers sont très demandés en cette saison. En effet, certains fellahs préfèrent recourir à leurs services pour couper les régimes de dattes. La rémunération à pas moins de 500 DA est négociée entre le propriétaire et l'employé selon les capacités physiques du grimpeur. D'autres fellahs choisissent d'accomplir cette tâche eux-mêmes. Hadj Bennacer a précisé qu'il préfère utiliser une corde pour les dattes destinées à la commercialisation en vue de garder les régimes intacts. Pour les dattes de moindre qualité, celles-ci sont directement battues. Les récoltes sont ensuite transportées dans des dépôts ou l'on procède à la réglementation de la production suivant des critères bien définis (qualité, catégorie).