Le «Berlusconi» chilien s'évertue à incarner une droite lavée de la souillure de la dictature avec ses 3200 morts et milliers de disparus . Même si la tête sera au tremblement de terre à Haïti et au Rallye Dakar qui, après l'Argentine, sillonne leur pays, quelque huit millions de Chiliens se rendront aujourd'hui dans les 35.000 bureaux de vote pour choisir qui de Sebastian Pinera, de la Coalition pour le changement (droite) ou d'Eduardo Frei, de la Concertation, la coalition de gauche au pouvoir depuis la fin de la dictature du général Augusto Pinochet (1973-1990), les deux rescapés du premier tour du 13 décembre dernier (44 et 29, 6 % des voix respectivement), occupera le palais de la Moneda pendant les 4 prochaines années. Le candidat de droite, qui était donné vainqueur par les sondages (50, 9 à 51,5 % de voix d'avance sur son rival), n'est plus sûr de redorer le blason des conservateurs. Le 13 janvier dernier, le dissident socialiste Marco Enriquez-Ominami, qui a recueilli 20,12% des voix au premier tour, a annoncé qu'il voterait pour Eduardo Frei, l'ancien président démocrate-chrétien (1994-2000). Même s'il estime que les deux candidats sont des personnages du passé avec lesquels on ne peut pas construire le futur. Explication de son choix : Pinera a soutenu, dit-il, ceux qui ont assassiné en 1974, son père, Miguel Enriquez, un dirigeant du Mouvement de la gauche révolutionnaire et n'exclut pas de faire appel à d'anciens fonctionnaires de la dictature s'il est élu. «Pourquoi faire des discriminations contre des gens qui ont fait leur travail entre 1973 et 1989 ?», s'interroge Sebastian Pinera. Quasiment à la même date, Jorge Arrate, un autre candidat socialiste dissident qui a recueilli 6, 21 % des suffrages au premier tour, a appelé à voter pour M. Frei au second. Last but not least, Michelle Bachelet qui finit son mandat de présidente le 1er mars prochain avec 75 % de taux de popularité-un record-aide à chacune de ses sorties M. Frei. Pour encourager les jeunes à voter, elle a préconisé l'inscription automatique sur les listes électorales dès 18 ans. Les deux coups de théâtre des dissidents, le soutien de Mme Bachelet qui attend la prochaine présidentielle pour revenir et la recherche pendant toute la campagne électorale, par la Concertation de la confusion entre la droite et la dictature, pourraient-ils changer la donne et fermer la porte de la Moneda devant le «Berlusconi» chilien qui s'évertue à incarner une droite lavée de la souillure de la dictature avec ses 3200 morts et milliers de disparus ? Si Pinera qui est allié à la très conservatrice Union démocratique indépendante qui a soutenu le général Pinochet, l'emporte, un séisme résonnera en Amérique latine gouvernée à gauche.